Témoignage
Claude Beniada, ex-entraîneur et journaliste, représentant de feu Khalid Abdullah et de Juddmonte Farms en France
« J’ai beaucoup de respect et d’admiration pour André Fabre, que je connais depuis quarante ans. Tout ce qu’il a accompli dans sa carrière d’entraîneur en France et à l’étranger n’a pas d’équivalent chez nous et nul doute que son palmarès restera longtemps inégalé. En juin 1988, je suis aux courses à Chantilly et, au programme, figure un maiden pour 2 ans inédits sur 1 200 mètres en ligne droite. André Fabre y présente l’un de ses pensionnaires monté par Cash Asmussen. À l’époque, il n’y a pas de télés partout sur l’hippodrome et le meilleur moyen de voir le déroulement final des courses est de se placer 100 mètres avant le poteau, derrière la lice opposée aux tribunes. De cet emplacement, on a une vue parfaite sur les 600 derniers mètres de course après la montée et sur l’emballage final. Je suis donc posté à cet endroit, aux côtés d’André Fabre. Son cheval s’impose brillamment avec une facilité déconcertante. Je le félicite et il me fait ce commentaire en rangeant ses jumelles :
« C’est très bien. Il va sans aucun doute faire un très bon cheval sur 2 400 mètres. » Nous sommes en juin de l’année de 2 ans de son pensionnaire et André Fabre voit déjà beaucoup plus loin. Je n’ai jamais oublié ces paroles et cela d’autant plus que ce cheval s’appelait In The Wings, qu’il appartenait à la première production de Sadler’s Wells, dont on ne savait pas encore quel extraordinaire étalon il allait devenir, et qu’In The Wings est devenu un des meilleurs chevaux de 2 400 mètres au monde. Depuis, j’ai toujours écouté avec la plus grande attention le moindre commentaire d’André Fabre sur un de ses chevaux et, pour avoir eu le privilège de travailler avec lui de nombreuses années pour Juddmonte, je peux témoigner de l’extraordinaire qualité de son jugement sur les pensionnaires qu’il entraîne. C’est là, à n’en pas douter, une des nombreuses raisons de son extraordinaire réussite. »
Témoignage
Jean Biju a monté en courses avec André Fabre, puis il est devenu journaliste à Paris-Turf et a retrouvé son ancien collègue entraîneur, mais pas très longtemps…
« Je le connaissais bien puisqu’un jour que nous avions monté ensemble à Nantes, je m’étais pas mal amoché et il avait proposé de me ramener, avec Elisabeth, à Maisons-Laffitte. Quelques années plus tard, j’étais devenu journaliste et les chevaux d’André Fabre gagnaient beaucoup de courses à Auteuil. Un jour, un 3 ans nommé Vernusson, qui appartenait à un ex-jockey de l’Ouest, Jean-Marie Vaillant, rejoint l’écurie Fabre pour débuter à Auteuil dans le Prix Georges de Talhouët-Roy, en novembre 1983 (le poulain avait déjà couru huit fois en plat et huit fois en haies, ndlr). Vernusson gagne de huit longueurs, devant un autre pensionnaire d’André Fabre. Pierre Pelat était furieux et il m’a défié d’écrire ce qu’il déclarait, à savoir que les pensionnaires de Fabre étaient des « avions ». Quelques jours plus tard, je suis avec le rédacteur-en-chef du « Turf », Jacques Orliaguet à Auteuil, et nous croisons André Fabre, qui salue M. Orliaguet et lui dit que ce n’est plus la peine de lui envoyer qui que ce soit après ce qui a été écrit sur ses chevaux ! C’est comme ça que cela a commencé… »
Témoignage
Dominique Costard, l’un des meilleurs jockeys d’obstacle français à l’époque où André Fabre était également jockey sur « les balais ».
« J’ai connu André Fabre au milieu des années 70, quand j‘ai dirigé ma carrière vers l’obstacle. Il venait de passer jockey et travaillait chez André Adèle. À cette époque, nous travaillions dans deux grandes écures rivales car j’étais jockey libre mais montais beaucoup pour Georges Pelat. André Fabre montait principalement pour André Adèle mais aussi pour Monsieur Biancone. Les jockeys étaient très durs dans les parcours, il fallait avoir du vice pour réussir. André Fabre savait s’adapter, même si lui venait du rang des amateurs et se comportait bien, dans l’ensemble. Il avait de l’éducation, alors que beaucoup d’entre nous étions simplement passés par l’apprentissage. Avec lui, pas de fête dans les vestiaires, comme cela pouvait être le cas, à l’époque. Il gardait toujours une distance entre chaque maillon de la chaîne. Il est aussi très observateur, et très droit, comme André Adèle l’était : quand quelque chose n’allait pas, il le disait très clairement mais sans épiloguer. En deux mots, tout était dit. Tout était pesé et la sanction était nette et directe. Mais, quand on avait sa confiance, c’était quelqu’un de fidèle qui ne vous lâchait jamais. »