SYLVAIN CHAVANEL
Galorama. Comment êtes-vous passé du vélo au sulky ?
Sylvain Chavanel. Par des relations, des connaissances que j’ai eues durant ma carrière. Plus jeune, mon père allait sur les hippodromes, j’ai un fils qui fait de l’équitation, du jumping. Il y a toujours eu finalement un contact avec le cheval. Durant mes années dans l’équipe belge Quick Step (2009-2013) j’ai fait la connaissance de Jos Verbeeck. Il m’a fait essayer et, de retour en France, je me suis dit que ce serait bien d’obtenir une licence d’amateur. Pour cela, il fallait que je sois parrainé, et j’ai eu les deux signatures de Philippe Daugeard et Dominik Cordeau, aujourd’hui décédé. Après, avoir payée ma licence et l’assurance, il fallait un cheval. J’allais chez un entraîneur, Jean-Jacques Beausse, qui pouvait m’en confier un, comme ça, un échange de bon procédé. Il était à 15 kilomètres de chez moi. Depuis 2023, j’ai fait une soixantaine de courses et j’en ai gagné trois.
G. Faites-vous un quelconque rapprochement entre les courses cyclistes et le trot ?
S.C. Non, pas vraiment. Ou alors la proximité avec les gens qui nous entourent dans le vélo. La proximité avec le public, ces supporters qui vous attendent à la sortie du bus pour un autographe, cette relation-là, humaine, oui, c’est pareil.
G. Vélo et trot sont des sports populaires, qu’appréciez-vous particulièrement ?
S.C. Je connais mieux les trotteurs, c’est un milieu proche de l’agriculture, milieu que j’apprécie beaucoup, dans lequel j’ai des amis.
G. Une fois sur un sulky, quel parallèle pourrait-on trouver avec le vélo ?
S.C. Moi qui ai fait de la piste (il a été deux fois champion de France de poursuite) je sais ce qu’est un anneau. Bien sûr, à vélo, le tour de piste ne fait que 250 mètres, mais être bien placé au départ joue énormément. Après, c’est une file montante, une file descendante et une ouverture à la fin qu’il faut trouver pour passer l’arrivée. Pour moi, c’était surtout retrouver sur le sulky cette dose d’adrénaline que l’on peut ressentir sur le vélo, la sensation de vitesse. À ceci près que vous avez une masse imposante devant vous et derrière vous (le peloton), même si c’est moins rapide. Sur un vélo, on va très vite aujourd’hui. On roule à près de 70 km/h tandis qu’à l’attelé, on culmine à 55 km/h.
G. C’est un bon palliatif une fois sa carrière terminée ?
S.C. On recherche toujours quelque chose, des sensations perdues, quand on arrête de courir. Je cours toujours en amateur avec un de mes fils qui veut faire du vélo. Driver, ça permet de réamorcer la pompe à adrénaline, surtout lors des départs.
G. Au niveau du poids, y a-t-il des points communs avec le vélo ?
S.C. En amateur, il y a toute sorte de gabarits, des plus ou moins lourds aux plus légers, il y a plus de filles qui courent, elles sont plus légères. Je pense que le poids c’est important, il faut être léger. Plus vous êtes lourd, plus c’est dur pour le cheval. Mais cela se joue plutôt au niveau de la sensibilité aux chevaux. Il faut les comprendre. Il faut arriver à driver des chevaux compliqués. Au début, il faut intégrer tout un tas d’informations, puis, avec le temps, on acquiert des automatismes. Je crois beaucoup au feeling, il ne faut pas d’agressivité dans les mains. Et puis il y a aussi les consignes des entraîneurs qui connaissent leurs chevaux.
G. Avez-vous eu l’occasion d’échanger avec des grands professionnels ?
S.C. Avec quelques-uns des meilleurs. Jean- Michel Bazire et Thierry Duvaldestin, davantage en sa qualité d’entraîneur. J’ai trouvé en lui quelqu’un qui tenait vraiment la route. Ça rend tout plus agréable.
G. Est-ce que vous êtes joueur ?
S.C. Non, rarement. Mais j’ai deux numéros fétiches, le 3, avec lequel j’ai pas mal gagné de courses, et le 7.
G. Pensez-vous acheter des chevaux ?
S.C. Moi, ce que j’aime c’est driver. Si j’achète un cheval, ce sera pour moi. Acheter un cheval pour le voir courir procure des émotions, bien sûr, mais être acteur, driver, ce sont des sensations. Et je préfère sans doute les sensations aux émotions.