Théâtre du H.H. The Amir Sword, Al Rayyan est le principal hippodrome du Qatar, situé à environ 7 kilomètres au nord de Doha. Il se compose d’une piste en gazon qui s’étend sur 1 800 mètres, d’une piste en sable de 1 400 mètres et d’une tribune de 1 400 places assises. Un centre d’entraînement et de bien-être pour les chevaux figure également en plein cœur, avec de récents aménagements créés pour accroitre la qualité d’accueil des chevaux, propriétaires, entraîneurs et jockeys. Le deuxième hippodrome est Al Uqda, plus récent, qui accueille également des réunions de course et un centre d’entraînement.
Pour la saison 2023-2024, 67 réunions de courses se sont tenues sur les deux hippodromes d’Al Rayyan (45 entre le 18 octobre 2023 et le 25 avril 2024) et Al Uqda (22 entre le 18 novembre 2023 et le 2 mars 2024), qui disposent tous deux d’une piste en gazon et d’une piste en sable corde à droite. Cela correspond à un total de 560 courses disputées, et plus de 7 800 engagés d’après le bilan dressé par le QREC et présenté par son Racing Manager Abdulla Al Kubaisi.
Galorama. Comment avez-vous commencé à travailler avec les Qatari ?
Jean-Pierre Deroubaix. Je me suis installé à mon compte dans les années 90 après avoir travaillé pour Horse France. La CCI et UBI France organisaient une tournée au Moyen-Orient : Koweït, Emirats, Bahreïn, Oman, Qatar, etc. L’objectif était de me présenter et de proposer mes services de courtiers et de consultant en création d’écuries, haras et hippodromes. J’ai rencontré le Sheikh Abdullah Al Thani lors de ce déplacement et j’avais présenté les projets sur lesquels j’avais déjà travaillé comme à Abu Dhabi. Quelque temps plus tard, Alban de Mieulle m’a contacté pour confirmer leur intérêt, d’autant plus que le Qatar devait organiser les Jeux asiatiques et qu’il fallait mettre en place toutes les infrastructures. Avec l’appui de Louis Romanet et du docteur Devolz, nous avons vérifié l’identité de tous les équidés, ainsi que les studbooks, et créé une quarantaine, entre autres. Il y avait un travail en profondeur à faire sur l’aspect sanitaire. Concernant les infrastructures, j’ai accompagné le QREC, en partenariat avec Gregori International, sur la création d’un manège, d’une clinique vétérinaire et d’un nouvel hippodrome. Tout a été prêt pour 2006 et les jeux asiatiques. J’ai également travaillé avec Al Shaqab sur leur structure privée.
G. À quoi ressemblaient les courses lorsque vous avez commencé à vous rendre au Qatar ?
J.P.D. Il y avait une réunion par week-end. Maintenant, il y a deux à trois jours de courses par semaine et deux hippodromes : Al Rayyan à Doha et un autre dans le nord, Al Uqda.
G. Comment avez-vous participé au développement des courses au Qatar ?
J.P.D. J’ai travaillé en tandem avec Louis Romanet pour aboutir au sponsoring du Prix de l’Arc de Triomphe. Le Sheikh Abdullah souhaitait qu’il y ait un Groupe 1 pour Pur-Sang Arabe lors du weekend de « l’Arc » et sponsoriser les deux courses. Le contrat de sponsoring des deux épreuves a ainsi débuté en 2008. En parallèle, j’ai continué à travailler avec les équipes à Doha pour finaliser les infrastructures, et ce, jusqu’en 2012. Cela a été une belle aventure équestre, humaine et d’amitié entre la France et le Qatar.
G. Quels sont les enjeux actuels des courses et de l’élevage au Qatar ?
J.P.D. L’hippodrome d’Al Rayyan se retrouve en pleine ville et Doha ne cesse de croître. Par conséquent, le Qrec ne peut plus s’agrandir et se développer sur cette zone. Aujourd’hui, les Qatari manquent de boxes et ont besoin d’en construire. Il est fort à parier que l’hippodrome sera déplacé, ce qui arrive fréquemment dans de nombreux pays. La jeunesse qatarie adore les chevaux et les courses. De manière générale, les Qatari aiment les chevaux et s’y intéressent beaucoup. Le pursang arabe est de l’ordre du sacré dans leur culture, avec un avantage certain sur le pur-sang anglais, car ils peuvent le toucher et le monter.
IMMERSION AU CŒUR DE LA PISTE, RETOUR D’EXPÉRIENCE AVEC LES JOCKEYS RONAN THOMAS ET OLIVIER D’ANDIGNÉ
Les jockeys français se sont illustrés à de très nombreuses reprises au Qatar, accrochant quelques-unes des plus belles épreuves à leur palmarès. Parmi eux, l’expérimenté Ronan Thomas a passé cinq saisons au Qatar depuis 2018, quatre au service d’Alban de Mieulle pour défendre les couleurs d’Umm Qarn Farm, et une année pour celles de Wathnan Racing. Celui qui a remporté le Prix du Jockey Club (Gr.1) en 2024 sur Look de Vega compte également un riche palmarès qatari, ayant terminé tête de liste des meilleurs jockeys à plusieurs reprises.
Le jockey français Olivier d’Andigné alterne, lui aussi, ses saisons entre le Qatar et la France depuis l’hiver 2021-2022, ayant rejoint le tout aussi jeune Jean de Mieulle, qui est entraîneur particulier pour Al Shaqab Racing. En début d’année, et après plusieurs accessits au plus haut niveau, le tandem s’est distingué en accrochant un premier Groupe pour la célèbre casaque avec Al Wakrah, une fille de TM Fred Texas, triple placée de Groupe 1 et qui s’est imposée dans la H.H. Sheikh Abdullah Bin Khalifa Al Thani Cup (Gr.2-PA).
Galorama. Quel est votre parcours ?
Olivier d’Andigné. J’ai débuté en tant que Gentlemanrider à l’âge de 16 ans jusqu’à l’obtention de mon BAC. Ce n’est qu’une fois mon diplôme en poche que je suis devenu jockey. J’ai commencé chez Arnaud Chaillé-Chaillé où je suis resté trois ans. Lorsque Jean de Mieulle s’est installé, nous avons beaucoup échangé et je l’ai rejoint. Maintenant, j’alterne entre les saisons au Qatar en hiver et celles en été en France. Quand je suis en France, je suis freelance. Je monte le matin en partie pour Jean et Alain Couétil. L’après-midi, je monte en courses.
G. Comment êtes-vous devenu jockey au Qatar ?
O.A. Je suis allé au Qatar la première fois lors de la saison 2021-2022. Jean m’avait recommandé auprès d’Alban de Mieulle. Depuis que Jean est devenu entraîneur privé pour Al Shaqab Racing au Qatar, je suis sous contrat avec eux. Je monte le matin pour eux ainsi qu’en courses. Si je n’ai pas de partants pour Al Shaqab Racing, alors je monte pour d’autres entraîneurs ou propriétaires.
G. Quelles similitudes et différences y a-t-il avec les courses en France ?
O.A. Il y a beaucoup de jockeys français et européens au Qatar. Par conséquent, il y a certaines similitudes dans la manière de monter. Cependant, la différence réside dans le rythme des courses. Il est plus soutenu et l’aspect tactique ressort moins. 70 % des courses au Qatar se déroulent sur 1 100 à 1 600m. Il faut de la vitesse.
G. Quelle est votre journée type : en dehors des courses, lors d’une journée de courses ?
O.A. Le matin, j’arrive à 3h40 aux écuries et nous sortons le premier lot à 4h. Nous montons entre 3 et 4 lots par jour pour finir à 8h. La matinée est plus courte qu’en France. Nous ne faisons que monter. Il y a toute une équipe de grooms qui s’occupe de nourrir les chevaux, de les soigner, de les préparer, etc. Quand il n’y a pas de courses, je fais du sport. Au Qatar, le rythme est moins soutenu et il est important de garder la forme et la ligne ! À Al Uqda, les courses débutent à 12h50. Il faut 30 minutes pour rejoindre l’hippodrome depuis Doha. À Al Rayyan, les courses débutent à 16h.
G. Pouvez-vous nous décrire les pistes des 2 hippodromes Qatari ? Leurs spécificités, leurs particularités ?
O.A. À Doha, sur l’hippodrome d’Al Rayyan, la piste en dirt est assez profonde. Il faut de réelles aptitudes à cette surface. Certains chevaux ont du mal à s’y adapter. Pour la piste en herbe, le tracé est assez serré. Il y a une petite ligne droite de 300 mètres et les tournants ne sont pas grands. Il n’y a pas vraiment de piège, mais elle facilite les chevaux montés de manière offensive.
La PSF d’Al Uqda convient à tous les chevaux. Le tracé de l’hippodrome est assez similaire à celui de Deauville avec de grands tournants et de grandes lignes droites.