La gloire de mon père N°4 Janvier 2025 | INTERVIEW

UN TARDIF QUI DÉMARRE À TOUTE VITESSE

MARK NEWHAM

Mark Newnham est la nouvelle sensation parmi les entraîneurs de Hong Kong. Arrivé la saison dernière d’Australie, où ses pensionnaires avaient déjà remporté de nombreuses courses de sélection, il a terminé sa première année avec 31 gagnants. Depuis la reprise en septembre, il est passé à la vitesse supérieure avec 20 gagnants en trois mois (au 14 décembre, mise à jour ici), à la 2e place du classement local au nombre de victoires. Son effectif affiche aussi un pourcentage de réussite de 15 % à la gagne, et surtout 36 % dans les trois premiers, des scores impressionnants sur un circuit aussi compétitif que celui de Hong Kong.

Réputé pour son approche méticuleuse et patiente de l ’ entraînement , Mark Newnham a notamment collaboré avec des légendes australiennes telles que Bart Cummings et Gai Waterhouse , membres du Hall of Fame des courses australiennes . Après un passage en Europe , il est retourné en Australie pour débuter son apprentissage de jockey auprès de Gai Waterhouse à la fin des années 1990 . Leur riche relation a conduit Newnham à travailler à plein temps avec Gai Waterhouse , et il peut prétendre avoir joué un rôle important dans ses succès . Il a notamment monté les cracks Pierro et Fiorente à l ’ entraînement avant leurs victoires respectives dans la Golden Slipper ( 2012 ) et la Melbourne Cup ( 2013 ), les deux plus grandes courses du programme australien .

« J’avais un bon travail avec Gai et je n’étais pas prêt ! »
Newnham a obtenu sa licence d’entraîneur en 2016 et s’est installé à Sydney, en Australie. « Mon grand-père était jockey et entraîneur, explique-t-il, les cheveux poivre et sel en brosse au sommet d’une fine silhouette de grand jockey, deux yeux bleu clair largement ouverts sur un monde qu’ils semblent encore découvrir. Mon père a été journaliste pendant 35 ans pour le Sydney Morning Herald, en tant que rédacteur sportif quand j’étais enfant, puis il s’est tourné vers la publicité après cela. J’ai commencé à monter à cheval à 15 ans. Ensuite, j’ai été jockey pendant 20 ans. Je suis allé en Corée et à Macao à l’époque. Ensuite, je suis devenu entraîneur adjoint de Gai Waterhouse durant cinq ans et j’ai commencé à entraîner à mon compte en 2016. Pourquoi pas plus tôt ? J’avais un bon travail avec Gai, et je n’étais pas prêt. J’étais un tardif ! »
Un tardif qui a bien joué sa partition : régulièrement dans le top 10 du très compétitif circuit de Nouvelle-Galles du Sud, son écurie a ainsi accumulé plus de 400 victoires, dont plus de 40 au niveau black-type.Ce n’est donc pas un manque de réussite qui a poussé cet homme de 55 ans à quitter son pays natal pour Hong Kong… « Ça a plutôt bien marché en Australie, admet-il. Nous avons eu 40, je pense, 43 gagnants de Stakes au cours des six années où j’ai entraîné là-bas. J’ai eu jusqu’à 70 chevaux à l’entraînement, mais j’avais probablement une moyenne de 50 à 60 galopeurs dans mes boxes, ce qui me convenait. Seulement, l’entraînement en Australie est devenu une énorme organisation, avec des écuries leaders de trois, parfois jusqu’à quatre cents chevaux à l’effectif. Je devais donc, soit m’agrandir considérablement, soit venir ici. Or, je préfère de loin entraîner cinquante à soixante, voire soixante-dix chevaux plutôt que des centaines. En Australie, on finit par être comme le PDG de l’entreprise d’entraînement !  Ce n’est pas ce que je voulais. J’aime les chevaux, jemonte toujours à l’entraînement, c’est pourquoi j’ai saisi cette opportunité. J’avais aussi déjà pas mal de propriétaires basés à Hong Kong. La transition a donc été assez facile. »

« Il est plus difficile de faire gagner les anciens »
On mesure mal à quel point cette transition peut être délicate. Il ne s’agit pas de juger du talent de l’entraîneur, car la qualité des chevaux qui lui sont confiés est déterminante. Or, à leur arrivée, les nouveaux entraîneurs héritent souvent de chevaux usés, manquant de moral ou éliminés par leurs prédécesseurs. Ils travaillent donc avec un matériau dégradé. Néanmoins, c’est sur cette période ingrate qu’ils sont jugés et que sont établies la qualité et la quantité des jeunes chevaux qui leur seront confiés. « La fin de saison a été très bonne, car la qualité des chevaux que j’ai rentrés s’est améliorée, explique Mark. J’ai aussi pris le temps de découvrir le système et son fonctionnement. J’ai acquis progressivement une assez bonne maîtrise de la situation. Une fois que l’on est à l’aise avec la façon dont tout fonctionne, nous étions prêts à démarrer vraiment rapidement cette nouvelle saison. Une des choses qui m’ont vraiment aidé, ça a été de pouvoir envoyer des chevaux à Conghua (le centre d’entraînement alternatif à l’hippodrome de Sha Tin, à environ 200km de Hong Kong, ndlr), car cela nous a donné beaucoup plus d’options d’entraînement. Nous avons pu utiliser davantage les pistes en herbe en montée, les marcheurs aquatiques, etc. Les chevaux plus âgés aiment un peu de variété et c’est beaucoup plus calme, là-bas. Je préfère avoir les chevaux plus jeunes et arrivés récemment à Sha Tin, car je les surveille de plus près jusqu’à ce que je sache réellement où aller avec eux. Mais je suis aussi heureux de gagner avec un jeune qu’avec un vieux routier, car il est en fait plus difficile de gagner avec les plus anciens. Ils sont plus difficiles à placer. Il faut vraiment penser différemment avec ces chevaux, parce qu’ils sont dans le système depuis un certain temps. Il faut donc changer quelque chose, essayer d’obtenir un résultat, mais la récompense est particulièrement appréciée quand ça marche. »
Avec 67 chevaux à l’entraînement aujourd’hui, dont 28 à Conghua et un tiers environ d’inédits à Hong Kong, Mark Newnham est encore à l’aube d’une nouvelle carrière et d’une saison qui est, d’ores et déjà, un grand succès.