Celui qu’on surnomme le « roi de la Riviera » stationne dans le top 10 des meilleurs entraîneurs d’obstacles depuis plus de quinze ans. Ancien jockey émérite de plat stoppé trop vite dans son élan, il s’est aussi essayé au sulky et rêve de Prix d’Amérique en tant que propriétaire de Jushua Tree, l’un des meilleurs trotteurs de la génération des 5 ans.
Difficile de trouver homme plus à cheval sur les trois disciplines (galop, obstacles, trot) que Yannick Fouin.
Galorama. Vous qui avez été jockey dans les trois disciplines , laquelle procure les plus grandes sensations ?
Yannick Fouin. Ça dépend du niveau, du type de courses. Mais l’obstacle, c’est ce qu’il y a de plus fort. Il y a toujours le risque de ne pas franchir la haie. Les trois disciplines procurent de bonnes sensations en vérité. On ne peut pas comparer un 1 000 m sur le plat avec du trot, même si le sulky, c’est super excitant. Quand on commence, c’est comme sur une mobylette : on a les yeux qui pleurent. Après, plus tu progresses, plus tu es équipé, bien assis : tu sais piloter. Sur un cheval, le stress n’est pas le même qu’à terre. C’est exaltant, mais il y a des jours où tu es bien, d’autres non. La compétition, c’est souvent une question de vagues positives et négatives. Il faut surfer sur les bonnes. Mais l’entraînement procure aussi de super émotions.
G. En termes d’émotions , quelles différences faites-vous entre le galop , l ’ obstacle et le trot ?
YF. Ça n’a rien à voir et c’est pareil à la fois. Quand on entraîne, c’est comme dans la vie, on a des coups de cœur un peu plus fort que d’autres, il ne faut pas se le cacher. J’ai la chance d’être un peu gâté. Après, j’ai mis du temps à m’en apercevoir. Le truc, c’est la gestion du stress. On dit que c’est bien d’en avoir, moi je dis non. Le stress, ça paralyse et ça donne des ulcères, comme pour les chevaux. Ce qui compte, c’est l’adrénaline.
G. Des craintes , vous n’en avez pas ?
YF. En obstacles, c’est difficile de ne pas en avoir. On craint toujours qu’il arrive quelque chose. C’est pour ça que j’ai très peu de chevaux de carrière, à cause de la peur du lendemain. Du stress, j’en ai un peu. Mais encore une fois, je préfère me nourrir d’adrénaline.
G. Peut-on être blasé par le succès ?
YF. Jamais ! L’avantage avec le cheval, c’est qu’il y a toujours des histoires. Un cheval qu’on a repéré, un copropriétaire associé, un propriétaire que tu aimes beaucoup. Il y a un côté humain avant tout. J’adore partager ce que j’ai.
G. Entre gagner un Groupe et une petite course de province , l ’ émotion est-elle très différente ?
YF. Oui quand même… Surtout si tu es parti d’en bas pour emmener un cheval tout en haut, c’est encore plus jouissif. Les courses, c’est une question d’objectifs. Après, partout où tu gagnes, quand tu passes le poteau en tête, tu te sens fort. C’est génial comme sentiment. J’arrive à une soixantaine de victoires cette année (57 au moment de l’entretien, mi-décembre), je suis ravi. Mon grand souhait, c’est de durer dans la régularité.
G. Quelle victoire vous a particulièrement fait tourner la tête ?
YF. Plusieurs, forcément. Mais celle qui me vient en tête, c’est le Prix Finot, cette année, avec Kurasso Blue, sur lequel j’étais associé avec un ami (Philippe-Georges Dumas) plus habitué à acheter des chevaux de handicap ou à réclamer. C’était un objectif de longue date. On l’avait fait débuter en plat, tout s’est passé comme souhaité : un vrai bonheur. On l’a vendu (à Gordon Elliott), car l’offre ne se refusait pas, mais ce fut une vraie belle victoire.
« L’obstacle, c’est ce qu’il y a de plus fort »
G. Vous vous imaginez un jour gagner le Prix d ’ Amérique avec Jushua Tree ?
YF. Non, je reste froid là-dessus. Après, c’est déjà une très belle histoire. Avec Jean-Michel (Bazire), on se connaît bien. Hugues Rousseau savait que je voulais un cheval chez lui. On est tombé sur Jushua Tree, excusez du peu (rires). Maintenant, je n’arrive pas à me dire que j’ai un cheval de Prix d’Amérique. Mais c’est Jean-Michel qui fait tout le boulot. Je pense que je vais plus stresser que lui. Au bord de la piste, on n’a aucune mainmise. Mais l’adrénaline est là.