Seule cavalière à avoir triomphé dans toutes les disciplines la même année, Barbara Guénet mériterait d’avoir son nom dans le Guinness Book des records. Qui mieux qu’elle pouvait analyser les sensations spécifiques au galop, à l’obstacle et au trot ?
« Va, je ne te « haies » point ». Barbara Guénet pourrait faire sienne cette litote revisitée du Cid de Corneille. Son Rodrigue à elle, le théâtre de ses sensations suprêmes, c’est le grand saut sur les pistes. « L’obstacle, c’est indescriptible. L’adrénaline est supérieure. Le niveau de sensations fait que c’est une discipline à part ». À jamais la première, et toujours la seule à s’être imposée dans toutes les spécialités la même année (en 2017), que ce soit en plat, en haies, en steeple, en cross, au trot attelé comme au monté, cette cavalière amatrice est tout indiquée pour peser et comparer le poids des émotions procurées par les différentes disciplines. En tant que jockey, son palmarès est solide : 98 succès en plat, 70 en obstacles, 61 au trot attelé, 20 au monté, huit Cravaches d’or des cavalières,
Eperon d’or du Fégentri (championnat du monde des amateurs) en obstacle 2013 (mixte), puis en plat en 2014 (cavalières), championne d’Europe des cavalières 2012… Or, son avis est dans l’ensemble assez tranché. « J’ai une préférence pour le cross. Les haies, c’est génial aussi. Vraiment technique. Il faut choisir ses trajectoires, cela demande un travail de dressage assez incroyable. L’obstacle ne supporte pas la médiocrité. Les belles courses à Auteuil, c’est vraiment ce que je préfère. Maintenant, une course reste une course : il faut anticiper, sentir son cheval et les autres dans le peloton ». Quand on lui demande quel cheval lui a procuré les meilleures vibrations, le temple de l’obstacle revient au galop : « Vizir d’Estruval. Quand j’ai gagné à Auteuil avec lui, après le gros open-ditch, il a tellement gagné de terrain que j’ai cru que tous les autres concurrents étaient tombés. Il avait une locomotion, un coup de rein assez peu commun. C’était vraiment un cheval qui sortait de l’ordinaire. » Entre un Grand Steeple-Chase de Paris et un Prix d’Amérique, néanmoins, son cœur balance. Si elle confie ne plus être remontée sur un galopeur depuis 2020 – « J’ai préféré m’arrêter au top, rester sur de bonnes sensations » -, le trot est son autre grande passion. En parallèle de sa micro-entreprise de prestations de services équins, c’est dans cette discipline qu’elle a choisie de se spécialiser comme entraîneur. Avec seulement deux chevaux pour l’heure : Guerrier Castelets (9 ans) et J’y suis j’y reste (6 ans). Et des statistiques très encourageantes : 4 victoires, 10 places en 22 courses.
2025 : un nouveau départ
Barbara nous a fait le privilège de nous annoncer que 2025 sera l’année du lancement de sa nouvelle activité de remise en forme. En effet, en collaboration avec la famille Terry, un centre de thalassothérapie verra le jour sur la commune d’Utah Beach. Cette structure, à l’image de la polyvalence de Barbara, sera à vocation trotteurs et galopeurs. Des infrastructures de qualité : accès aux plages sans restriction, marcheur, tapis roulant, solarium, paddocks avec cabanes, arène pour sauter et une piste de galop, en sable, de 900m. Nul doute que ceux qui y séjourneront seront bichonnés.
Le trot, mais l’attelé de préférence. « Le trot monté, ce n’est pas ce que je préfère, ou alors il faut vraiment avoir de bons chevaux, surtout en amateur. Sinon, ce n’est pas toujours très sexy. Je me régale beaucoup plus à l’attelé, c’est plus technique. La première fois qu’on monte sur un sulky, on a de très bonnes sensations de vitesse ».
L’amour inconditionnel du cheval
Son Guerrier Castelets le lui rend bien. Il lui a offert son premier succès en tant qu’entraîneur, propriétaire et driver à Vincennes. Depuis qu’elle l’a pris sous sa coupe, en mai 2023, ce sont quatre victoires et son premier Quinté+ en février dernier. « À vrai dire, je ne savais pas que c’était un Quinté+, sourit-elle. C’est un cheval extra. Très difficile au début, mais il a fini sa crise d’ado ». Plus les années passent, plus Barbara Guénet estime que les trotteurs se rapprochent des galopeurs. « Ils sont beaucoup dans le sang, sont réceptifs comme des pur-sang ». À l’entraînement, le parallèle vaut aussi : comme Louis Baudron, celle qui vit à Grosbois l’hiver et bientôt Utah Beach l’été, où elle vient d’acheter une petite maison, voit plusieurs similitudes entre le trot et l’obstacle. « Les deux demandent à être façonnés, mécanisés. L’allure du trotteur n’est pas naturelle à grande vitesse. Cela demande beaucoup de travail en amont, comme pour apprendre à un cheval à sauter très vite et très bien ». L’amour du cheval, lui, dépasse toutes les différences. « J’aime les chevaux plus que les courses, quelle que soit la discipline. Et je ne peux pas dire que j’en préfère un aux autres, ce serait comme privilégier un de ses enfants, ce ne serait pas juste ». Son fils Léo, justement, suit depuis peu les traces de sa maman. « Mon objectif, c’est qu’il gagne avec ma casaque ». Pierre Corneille lui soufflera peut-être : « Aux âmes bien nées, la valeur n’attend point le nombre des années ».