Katherine Ford
Passionnée par les courses, Katherine a quitté son Yorkshire natif pour passer six mois en France au début des années 2000... et presque 25 ans plus tard, elle y est toujours. Aujourd’hui journaliste et traductrice freelance, elle a découvert et fait découvrir les hippodromes du monde pour Equidia et elle présente régulièrement les courses françaises sur Sky Sports Racing. Elle est aussi éleveuse et propriétaire de pur-sang.
Igor de Maack
Associé-dirigeant au sein du cabinet de gestion en patrimoine Vitalepargne, Igor de Maack est une référence dans l’analyse des marchés financiers. Il a également investi dans les chevaux (Écurie Nininoé) par passion, grâce à son amitié avec Fabien Rycroft (Écurie Elag). Initialement actif au trot, il s’est diversifié dans le galop, comptant notamment sur Lindy et Onesto.
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Économie mondiale
Romane Borrione
Française expatriée depuis cinq ans à Melbourne, Romane bénéficie d’une expertise en tant que courtier, cavalière et assistante entraîneur. Passionnée par l’étude de la performance et des données, elle a lancé son entreprise d’analyse de données, Race Day Ready, qui se développe fortement en Australie et à Hong Kong.
CHRISTMAS SPIRIT
Les Christmas cards représentent une grande tradition de Noël en Grande- Bretagne. Chaque ménage en reçoit des dizaines, de la part de la famille , des amis, des collègues… Pour les amateurs des courses, c’est la carte de vœux de l’Injured Jockeys Fund qui occupe la place de choix au centre de la cheminée. Il faut dire que ces cartes, aux tableaux de paysages hippiques enneigés ou de belles scènes de courses, sont des petites œuvres d’art . Et en plus , quand le facteur nous livre une carte de l’IJF, on sait que quelques pennies ont été distribués pour la bonne cause. Une bonne cause qui existe depuis 1964, quand cet organisme caritatif a été créé par un groupe de jockeys suite aux graves accidents de deux de leurs collègues. Jack Berry était l’un des instigateurs du mouvement et aujourd’hui, à plus de 85 ans, il est une sorte de Père Noël pour tous les jockeys blessés, et pas seulement à cause de la chemise rouge qu’il porte 365 jours sur 365 ! Tout en exerçant une carrière de jockey et puis d’entraîneur, Jack Berry a consacré sa vie à l’association. L’une des premières actions était de proposer à la vente sur les hippodromes ces fameuses Christmas cards, dont une partie du prix était reversée aux jockeys sur la touche. Jack Berry ne s’est pas arrêté là, et grâce à sa vision et son énergie inépuisable pour récolter des fonds, l’Injured Jockeys Fund compte aujourd’hui trois centres de réhabilitation dédiés à Lambourn , Newmarket et Malton dans le Yorkshire (le bien-nommé Jack Berry House) pour soigner les jockeys accidentés, mais aussi leurs familles ou le personnel des écuries. L’association multiplie ses activités, que ce soit les aides financières pour les familles de jockeys sur la touche ou en besoin d’adapter leur résidence en cas de handicap, le soutien au bien-être mental, le suivi et conseil en nutrition et même une semaine de vacances au soleil chaque année pour les anciens jockeys en situation difficile. En 2024, l’Injured Jockeys Fund a célébré 60 ans d’existence et a dépassé la barre des 2 000 bénéficiaires. Lors de la journée de Champions Day, à Ascot en octobre, Jack Berry a été introduit au Hall of Fame des courses pour sa contribution à cette œuvre caritative ; seulement la troisième personne à être honoré dans la catégorie de « Contribution Spéciale » après la Reine Elizabeth II et le Prince Khalid Abdullah. Chaque année, l’association dépense environ 5 millions d’euros pour aider les jockeys en difficulté et une partie de ces 5 millions est financé par la vente des charmantes cartes de Noël qui nous rappellent que la période festive est un moment où il faut penser à autrui.
COURSES AUSTRALIENNES : LE DÉFI DE LA VITESSE
Lorsque je suis arrivée en Australie, une phrase de mon premier employeur (Ciaron Maher Racing) m’a marquée : « Un cheval doit être bon sur court pour être bon sur long ». Habituée au système français, où même un deux ans peut débuter sur 1 600 mètres et être très performant, cette idée me semblait étrange. En France, nous privilégions des distances adaptées aux aptitudes naturelles, et ce dès le début de carrière. En Australie, en revanche, il est très peu courant de voir un cheval australien, même avec un pedigree orienté «distance», débuter sur plus long que 1 200 ou 1 400 mètres. Avec le temps, l’observation et la recherche, j’ai compris que cette approche repose sur plusieurs principes. Tout d’abord, un principe technique concernant les terrains, qui sont ici rapides presque toute l’année. Les courses sont souvent axées sur des distances courtes ou intermédiaires, demandant des performances éclairs, et cela s’aligne avec une génétique locale dominée par des sprinters. Par ailleurs, cette affirmation repose en réalité sur une base scientifique, le concept de « réserve de vitesse ». Ce concept, connu dans le milieu de la course à pied, explique que travailler une mécanique de vitesse élevée sera également bénéfique sur des vitesses plus lentes, grâce à l’amélioration de la biomécanique de l’athlète. La « réserve de vitesse » est aussi liée au recrutement des fibres musculaires rapides, qui doivent être entraînées pour rester disponibles, même sur de longues distances. Ainsi, pour être rapide ou efficace musculairement sur long, il faut pouvoir être rapide sur court. Dans ce système, il est vrai qu’un excellent cheval australien aura très souvent débuté et gagné sur de courtes distances avant d’aller sur des distances plus longues au fil de sa carrière. Cependant, c’est là que l’affirmation s’arrête : dans la majorité des cas, au-delà de 1 600 mètres, pour des chevaux purement de distance, il est illusoire de croire que certains pourront performer au plus haut niveau avec un entraînement basé uniquement sur des méthodes de « sprinter ». La réalité est qu’aucune méthode ne convient à tous les chevaux et que tout réside dans la nuance. Même des chevaux d’excellence auront leurs limites, qu’il s’agisse de gagnants de Melbourne Cup n’ayant jamais performé sur de courtes distances ou, à l’inverse, de sprinters incapables de tenir une course de distance. Les exemples sont nombreux en ce sens, des deux côtés de l’hémisphère. Ces constats invitent à explorer les nombreuses croyances du milieu des courses, qui ont parfois la vie dure, et à les confronter à la recherche scientifique, aux données de performance et aux résultats empiriques. Cela permet d’affiner la compréhension de l’entraînement et d’adapter au mieux nos méthodes aux chevaux et aux objectifs.
SAUTER L’OBSTACLE SANS TOMBER DE SA MONTURE
Une instabilité inédite en France, un rôle de l’État au sein de l’économie refondé aux États-Unis, les finances publiques qui deviennent un handicap et les bourses qui privilégient les actions outre-Atlantique au détriment des européennes. Tour d’horizon de l’économie de la fin d’année 2024.
Jamais peut-être dans l’histoire du capitalisme moderne, la question des finances publiques et de la place de l’État en tant qu’agent budgétaire et redistributeur n’aura été aussi pertinente et controversée. La nomination d’Elon Musk au poste de « ministre » de l’efficacité gouvernementale indique que le nouveau pouvoir en place aux États-Unis souhaite refonder le rôle de l’État dans l’économie dans une sorte de remake reaganien. Depuis la dissolution de l’Assemblée nationale, la France se trouve, elle, confrontée à une instabilité politique unique et baroque dans son histoire. Après le jockey Michel Barnier, le Président a confié la drive du sulky France à François Bayrou. On perçoit toujours mal comment une majorité unie resurgirait du kaléidoscope politique actuel pour élaborer, puis voter un programme économique « censé » (un savant mélange entre hausse modérée et temporaire des impôts et coupe franche et pérenne des dépenses publiques). Les finances publiques commencent à être un véritable handicap. Premièrement, parce que dans la plupart des pays, leur poids devient difficilement supportable pour le contribuable. Et deuxièmement, parce que leur efficacité dans certains domaines interroge. Certains pays, certes contraints par des institutions internationales type FMI, comme les pays d’Europe du Sud, réalisent des efforts, d’autres (comme la France) non. Certains pays peuvent se permettre de ne pas en faire grâce à leur potentiel de croissance (les États-Unis), d’autres (comme la France) non. La France parie toujours sur la complaisance des marchés financiers puisque le taux d’intérêt des obligations souveraines françaises sur une maturité de dix ans s’élève à environ 2,85 %. Les bourses continuent, elles, de privilégier les actions américaines au détriment des actions européennes et particulièrement des actions françaises. Sénèque disait « il n’y a point de vent favorable pour celui qui ne sait pas dans quel port il veut arriver ». Sur une piste de galop, quand un cheval sort des boîtes, il doit vite s’élancer, car tout retard pris rend l’arrivée plus complexe. C’est aussi vrai pour le redressement des comptes publics.