Tour de France N°10 Juillet 2025 | Histoires Insolites

Histoires insolites

Par Céline Gualde

Bons baisers de l’hippodrome
Philippe Lucas est un passionné des courses et plus précisément des hippodromes. Il faut dire que ce retraité a officié durant plus de trente ans en tant qu’électricien à Longchamp, une fonction qui l’a également mené à Chantilly et Deauville. Fasciné par la beauté architecturale des hippodromes, Philippe s’est mis à collectionner les cartes postales les représentant. Il en possède aujourd’hui plus de mille deux cents. Ces petits rectangles arborant de belles écritures sur leur verso sont une façon décalée et parfois émouvante de raconter l’histoire des courses et plus globalement de la société française. Philippe aime examiner les personnages figés sur les clichés en noir et blanc, voir évoluer les tenues des dames autrefois corsetées et chapeautées dont les silhouettes se sont libérées au fil du temps... Les cartes gardent aussi le souvenir d’hippodromes disparus comme celui de Mortagne-au-Perche, dans l’Orne, dont ne subsistent plus que les tribunes, ou celui de Pontl ’Evêque, dans le Calvados, qui ferma ses portes dans les années 1920. Philippe Lucas expose parfois des pans de sa collection sur les hippodromes et rêve d’en faire un livre axé sur les années 1900. Le projet est en cours aux éditions Lavauzelle.

 

Tous les chemins mènent à l’hippodrome
Quel est le point commun entre Thomas Miscannon, retraité de la marine américaine, et Mike Parcej, employé d’une entreprise de matériel informatique à Birmingham ? Tous deux vouent une passion aux hippodromes. Thomas arpente le monde grâce à des avions-cargos militaires auxquels son statut d’ancien de la Navy lui donne accès. Mike, atteint d’une forme d’autisme qui l’empêche de conduire, se déplace d’un champ de courses à l’autre en transports en commun. Thomas Miscannon a visité 424 hippodromes à travers le monde, série en cours ! Ex-propriétaire de pur-sang, il aime arriver en amont des réunions de courses pour fouler les pistes et visiter les infrastructures. Sa passion pour la chose hippique l’a conduit dans dix-sept pays. Il est accueilli en VIP sur les hippodromes qui ont eu vent de son pèlerinage d’un genre un peu particulier ! Ainsi Roscommon, en Irlande, a déroulé, mi-juin, le tapis rouge pour ce visiteur venu tout droit de Floride. Mike se souvient précisément du jour où sa passion pour les courses s’est déclenchée : le 13 septembre 1980. Il était adolescent et son autisme - qui lui donne une excellente mémoire des dates - n’avait pas encore été détecté. Mike avait du mal à se concentrer et à s’intéresser durablement à un sujet, jusqu’à ce qu’il tombe sur une retransmission des courses à la télévision. La passion du cheval - et non du jeu, car il n’est pas turfiste - ne l’a plus quitté. Ce fan de l’Obstacle connait tous les champs de courses anglais et la plupart des irlandais. Il était présent à Auteuil le week-end du Grand Steeple-Chase, partageant son enthousiasme avec ses près de 10 000 followers sur les réseaux sociaux ! Qui sait, Thomas et Mike finiront peut-être par se croiser sur un hippodrome !

Les hippodromes ont souvent inspiré les auteurs de polars. Le plus célèbre d’entre eux est certainement l’ex-jockey britannique Dick Francis, titulaire de plus de trois cent cinquante victoires et qui eut l’honneur de porter durant plusieurs saisons les couleurs de la reine d’Angleterre. Forcé de renoncer à sa carrière suite à une chute, Francis est devenu un auteur de romans policiers à succès. Il en a « pondu » un par an quasiment jusqu’à sa disparition en 2010. Tous ses livres ont pour décors des univers hippiques Du côté des nombreux auteurs français inspirés par le monde des courses, citons Frédéric H. Fajardie, qui excella dans les romans noirs. Le pitch de Sous le regard des élégantes, paru chez Gallimard en 1998 ? « J’étais jeune et riche, Cravache d’or et crack-jockey des courses d’Obstacle. Une vie de rêve. Et puis je l’ai vu, un matin : un grand cheval nommé Hard to beat. En une seconde j’ai compris deux choses : primo, que ce cheval serait le plus grand champion de tous les temps, secundo, que les ennuis allaient commencer. Entre les hippodromes d’Auteuil, d’Aintree et de Cheltenham, ça tombait pire qu’au Vietnam : neuf canassons étendus raides et pas moins de trente-trois macchabées humains. » Le charmant hippodrome d’Hyères-les-Palmiers, dans le Var, vient d’être choisi par l’auteur Olivier Aubert comme cadre du meurtre affreux d’un driver, tué dans un box un jour de courses. Le livre paru en mai se nomme Le coup du sabot et est disponible sur l’hippodrome ou en passant commande sur le site d’Olivier Aubert.