Retour vers le futur N°7 Avril 2025 | JOCKEY : DELPHINE SANTIAGO « JE SUIS UNE GUERRIÈRE ! »

JOCKEY : DELPHINE SANTIAGO « JE SUIS UNE GUERRIÈRE ! »

Par Paul Casabianca

Le 8 mars est la Journée internationale des droits des femmes. Dans les pelotons, la plus connue d’entre elles se nomme Delphine Santiago. Auteure d’un premier trimestre remarquable, la multiple cravache d’or féminine a toujours soif de victoires.

Galorama. Delphine, vous figurez, au 31 mars, à la troisième place du classement des jockeys. On peut dire que 2025 a démarré sur les chapeaux de roue…  
Delphine Santiago. J’avoue que ce début d’année est assez exceptionnel. Figurer dans le top 3 à la fin du mois de mars, je ne m’y attendais vraiment pas. Pour vous dire la vérité, je me suis rendue à Lourdes avec ma grand-mère cet hiver et j’ai fait un vœu. Je crois qu’il est en train de se réaliser...

G.    Même s’il n’est jamais bon de le divulguer, pouvez-vous nous en dire quelques mots ?
D.S.    Je veux me donner à 3 000 % ! J’ai l’ambition de remporter la Cravache d’or féminine en 2025 et de battre mon record de victoires sur une année (80 en 2023).

G.    Pour ceux qui vous connaissent peu ou prou, racontez-nous votre parcours...  
D.S.    Avant de devenir jockey, j’ai monté un cheval pour la première fois en balade. Je faisais exprès de laisser les autres partir pour les rattraper au grand galop. J’ai souvent fini sur des branches d’arbres (rires). J’ai ensuite pris des cours d’équitation. J’ai passé mon Galop 6, puis je suis entrée à l’école de l’AFASEC de Mont-de-Marsan. J’ai effectué mon apprentissage chez la famille Guillemin (Jean et Didier). J’y ai dressé des chevaux d’obstacle avant de monter en course en 1995. Ensuite, j’ai poursuivi ma formation chez Bruno de Montzey, Patrick Nicot, Robert Collet, Cricket Head et John Hammond avant de devenir jockey free-lance.

G.    Vous avez monté en course pour la première fois en 1995. À l’époque, il était difficile de se faire une place dans des pelotons composés exclusivement d’hommes. Trente ans après, vous êtes toujours là, meilleure que jamais. Quel est votre secret ?
D.S.    Je n’ai pas réellement de secret. Pour réussir dans ce métier, il faut un maximum de chance : être là au bon moment, au bon endroit et avoir la confiance des professionnels tout en respectant les chevaux. Je ne sais pas si j’ai plus de talent qu’une autre, mais je respecte mon cheval. Je suis à son écoute. Je le rassure quand il est anxieux et j’essaie de le mettre dans les meilleures dispositions avant la course pour qu’il donne le meilleur de lui-même.


G.    De plus en plus de jeunes femmes sont présentes dans les écoles AFASEC. Quels conseils pourriez-vous leur donner ?
D.S.    Ce métier, c’est comme un mariage. Cela demande beaucoup de sérieux, pas d’excès, de la rigueur, de l’amour, mais il y a aussi beaucoup de contraintes et de concessions à faire. Pour y arriver, je leur conseillerais la rigueur et le travail. Il faut aussi de la chance et éviter les chutes. Toutes mes blessures m’ont marquée. J’ai beaucoup appris durant mes convalescences, mais après avoir vécu l’enfer, de bonnes nouvelles sont arrivées par la suite. J’ai rencontré la personne qui partage ma vie aujourd’hui pendant ma convalescence. Je suis croyante et Dieu m’a beaucoup apporté. En 2020, après ma fracture ouverte de la cheville droite, les chirurgiens m’ont dit que j’étais condamnée et que dans six mois, je ne pourrais plus monter à cheval. J’ai perdu en mobilité et j’ai changé ma façon de monter, mais je suis toujours là. Je remercie toutes les personnes qui me soutiennent et me font confiance. Il y a eu des moments difficiles, comme dans tous les métiers, des moments de doute aussi, mais avec l’expérience, j’ai appris à ne jamais baisser les bras. On peut dire que je suis une guerrière !


G.    Vous avez décroché à onze reprises la cravache d’or féminine. Vous détenez le record de victoires d’une femme jockey en France (749 succès à ce jour). Quels sont vos meilleurs souvenirs ?
D.S.    Mes années d’apprentissage chez la famille Guillemin et Bruno de Montzey ont marqué ma carrière. J’ai reçu l’Étrier d’or (meilleur apprenti de France) : c’est aussi un moment inoubliable, comme ma première cravache d’or féminine. Je me souviens de la cérémonie à Deauville où j’ai été très bien reçue.

G.    Le 28 février dernier, vous avez fêté vos 46 printemps. Que peut-on vous souhaiter ?
D.S.    Ne pas prendre quatre kilos de plâtre, ce serait déjà pas mal (rires). Et bien évidemment, atteindre mes objectifs !