Par Serge Okey
On ne se figure jamais à quel point l’opérateur historique des courses hippiques compte parmi les leaders du numérique en France. Rien d’illogique, pourtant, quand on brasse comme lui des milliards de données. Il y a quatre ans, le PMU a basculé dans l’IA et plongé dans un nouveau modèle d’entreprise.
À bientôt cent ans (en 2030), le PMU aime à se dépeindre comme « une vieille boite moderne ». Les chiffres donnent le vertige : 2 milliards de paris annuels, 500 000 par heure, plusieurs centaines à la seconde. Avec des pointes de trafic, les jours de grandes courses, comparables aux champions du e-commerce un jour de Black Friday.
En interne, « les premiers algorithmes de « machine learning » (apprentissage automatique) datent de 2018. La data avancée est en production depuis la même époque. L’utilisation de l’IA générative (technologie de création autonome de contenus) il y a trois ans. On a déjà déposé deux brevets : le premier vise à améliorer la capacité d’un ordinateur à identifier des objets dans des images. Le second à accélérer le fonctionnement des systèmes d’intelligence artificielle avancés, comme ceux utilisés pour chatGPT », résument Anthony Hyvert, directeur de l’innovation (CTO) et Nicolas Ortiz, spécialiste de la data (chief data officer).
Tout cela a invité à un « vrai changement de cap depuis un an et demi, via une dizaine de projets innovants, à la fois en interne, en direction de nos clients et partenaires et des parieurs ». Les deux spécialistes insistent sur ce point : « On ne fait pas des projets qui remplacent les personnes, mais pour faciliter la vie, accompagner le client. L’IA est un assistant dans un process « Human in the loop ». Où l’humain conserve un rôle central. »
Demain, les informations à destination des parieurs promettent d’être plus personnalisées. En interne, l’IA générative est déjà utilisée par la moitié des 1 100 collaborateurs au quotidien. Un ChatGPT « 100 % maison » ne cesse de prendre du volume. « On y a intégré tous les documents internes à l’entreprise, notamment pour bien comprendre la loi et tous nos documents RH. Il nous permet d’analyser nos contrats, comparer nos achats, générer des sondages. On sait même analyser la voix du client dans des enquêtes de satisfaction ».
« Le Spot, c’est déjà un algorithme »
« Ces techniques aident aussi à un travail de veille. Le PMU propose des « modérateurs pour un jeu responsable ». Aujourd’hui, de nouveaux algorithmes sont déployés pour suivre les comportements de jeu et lancer, le cas échéant, « un plan d’action de réduction des risques et de prévention » auprès des parieurs en les invitant à modérer leur pratique. « L’IA arrive donc partout dans nos métiers ».
Les gains, les rapports sont calculés selon des modèles « purement mathématiques ». Mais le Quinté+ Spot, « c’est déjà un algorithme ». Tout est guidé par les valeurs business. Le principe, c’est que le progrès rapporte. Un credo accompagne la nouvelle Appli PMU+, lancée en mai 2024 : « Performance, performance, performance... et sécurité informatique ». Alors oui, tout cela a un coût. Mais selon nos deux spécialistes, au PMU, l’IA utilisée coûte « 6 à 7 fois moins cher » que ChatGPT ou Gemini. « On s’est tourné vers les outils les moins chers et les moins énergivores du marché ». Un nouveau plan d’amélioration de 3 ans est déjà sur la table pour l’an prochain.