Axelle Nègre de Watrigant: « Des dérives difficiles à contrôler »
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Axelle Nègre de Watrigant: « Des dérives difficiles à contrôler »
Quid du pur-sang?
Le stud-book du pur-sang anglais est mondial. Les mêmes règles s’ appliquent donc dans les soixante-huit pays qui élèvent cette race. La seule technique de reproduction admise est la monte naturelle: le clonage et toute méthode d’ insémination artificielle sont interdits. Il en va de même en France chez les AQPS et les anglo-arabes, qui ne sont pas autorisés à courir si eux-mêmes ou l’ un de leurs ascendants sont issus de l’ insémination artificielle. « Il est hors de question que la règle change, déclare Loïc Malivet, président de la Fédération des Éleveurs du Galop. L’ ITBF( International Thoroughbred Breeder’ s Federation) l’ a réaffirmé lors de sa dernière réunion au Japon en mai 2024 lors d’ un vote à l’ unanimité. Elle en avait fait de même deux ans plus tôt. Cela nous protège, car si l’ insémination artificielle devenait légale, on aurait du mal à éviter certaines dérives. Qu’ est-ce qui empêcherait les étalons les plus en vue de saillir mille juments? ».
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Éleveuse et présidente de l’ AFAC( Association Française du cheval Arabe de Course), Axelle de Watrigant explique que le recours à l’ insémination artificielle est indispensable dans cette race: « Notre filière est à 100 % internationale et nous avons en France beaucoup d’ étalons très demandés par les éleveurs étrangers. L’ insémination est une technique formidable sur le plan de la sécurité sanitaire et parce qu’ elle évite de faire voyager les juments, mais la réglementation évolue hélas moins vite que le progrès scientifique ». Le stud-book français du pur-sang arabe autorise une jument à avoir deux produits par an: l’ un qu’ elle porte et l’ autre implanté sur une porteuse. Mais cette règle est détournée, car une jument peut avoir deux poulains en France plus d’ autres, d’ un ou plusieurs étalons, qui naîtront à l’ étranger grâce au transfert d’ embryon. Ils seront inscrits au stud-book de leur pays de naissance. L’ ICSI, bien qu’ elle soit totalement interdite par la WAHO( World Arabian Horse Organisation), mais qui permet de faire facilement voyager des embryons congelés, commence aussi à être utilisée dans ce cadre. Il n’ est donc pas impossible de voir deux frères ou sœurs utérins nés la même année au départ d’ une même épreuve. « Le code des courses de France Galop interdit la participation de deux propres frères ou sœurs du même âge, précise Axelle de Watrigant. Si le cas- très exceptionnel- se produit, un tirage au sort désigne le cheval maintenu dans l’ épreuve. Le code des courses n’ interdit malheureusement pas, en revanche, que deux chevaux du même âge issus de la même mère, mais avec un père différent, prennent le départ de la même course ». L’ AFAC plaide pour que la réglementation internationale soit calquée sur le modèle français: deux produits par jument et par an( l’ un porté plus un transfert), pas davantage. Mais les réformes sont compliquées à faire passer. « Lors de la dernière réunion de la WAHO, en avril, l’ idée a commencé à faire son chemin mais n’ a pas encore été rendue obligatoire, seulement fortement recommandée. Mais les mentalités évoluent, car les plus grands sponsors de nos courses comme le Qatar et Abu Dhabi ont décidé de soutenir la règle française. Le bien-être animal et la diversité génétique doivent prévaloir ». Axelle de Watrigant n’ est pas favorable à l’ introduction de l’ insémination chez les pur-sang anglais. « Outre la question de l’ appauvrissement génétique, je considère que c’ est globalement un grand danger. Si on l’ autorisait un jour, il faudrait qu’ une réglementation extrêmement précise et très stricte soit établie en amont et au niveau mondial afin d’ éviter toute dérive ».
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