Feel Good N°8 Mai 2025 | Obstacle

À LA RECHERCHE DU PROCHAIN WALK IN THE PARK

Par Jacob Pritchard-Webb

Au fil de l’histoire, des figures influentes ont toujours créé des tendances, aussi bien en musique, dans la mode ou encore en politique. Dans les courses d’obstacle, la tendance est claire : le modèle français est le meilleur. Cela peut être débattu, mais trois personnes en quête de chevaux FR ont contribué à cette tendance selon moi : Martin Pipe, Paul Nicholls et Willie Mullins. L’appétit pour les « FR » fait que de plus en plus de personnes se retrouvent dans les prés à dénicher des foals, se déplacent pour sillonner les places de ventes, se pressent dans les tribunes d’Auteuil en quête de débutants prometteurs ou assistent aux parades d’étalons.

SUIVANT LA TENDANCE FRANÇAISE : PRODUIRE DES ÉTALONS EN REPÉRANT DE JEUNES MÂLES BIEN NÉS PAR WALK IN THE PARK, ET LES ENVOYER COURIR EN FRANCE.

Les « FR » génèrent de l’intérêt, tout comme le marché. La preuve est bien là avec notamment deux anciens jockeys britanniques qui s’y distinguent : James Reveley, triple Cravache d’or, et Felix de Giles, titré il y a deux ans et actuellement en tête du classement. Amy Murphy a, quant à elle, récemment, déménagé en France pour rejoindre les rangs des entraîneurs britanniques installés, à l’instar d’Anne-Sophie Crombez, Carla O’Halloran, Louisa Carberry ou encore Noel George. L’arrivée de ces nouveaux entraîneurs attire également des propriétaires britanniques ou irlandais. L’une des présences les plus intrigantes dernièrement – et peut-être surprenantes – est celle de Coolmore, ou plus précisément de Susan Magnier, épouse de John Magnier. John Magnier, gendre de Vincent O’Brien, est l’un des trois membres fondateurs de Coolmore, aux côtés de Michael Tabor et Derrick Smith. Les Magnier élèvent des chevaux de course depuis 1850, dont le légendaire Galileo , pour ne citer que lui plat. Élevé par le baron Édouard de Rothschild, Cottage , acheté par les Magnier et stationné par la suite au Grange Stud, a terminé tête de liste des étalons d’obstacles peu après sa mort en 1941. Sa production compte trois gagnants du Grand National, dont Cottage Rake , qui a gagné la Gold Cup à trois reprises, et fut le premier étalon à avoir deux fils gagnants de la Gold Cup et du Grand National la même année - un exploit réédité cette année par Walk In The Park , pilier du parc d’étalons d’obstacle de Coolmore. Il compte quatre-vingt cing performers black type en plat et en obstacle à son palmarès, dont trente-deux gagnants de Groupe. Alors qu’à 23 ans, Walk In The Park approche de la fin de sa carrière, John Magnier a décidé d’anticiper la suite en suivant la tendance française : produire des étalons en repérant de jeunes mâles bien nés par Walk In The Park , et les envoyer courir en France.

À la recherche du prochain Walk In The Park

Ces dernières années, les fils de grands étalons sont très recherchés à leur arrivée au haras. Martaline, Saint des Saints, Kapgarde et Doctor Dino dominent la scène, et leurs fils marchent dans leurs pas : Moises Has , Beaumec de Houelle et Nirvana du Berlais pour Martaline; Jeu St Eloi , Goliath du Berlais , Magic Dream pour Saint des Saints; Paradiso pour Kapgarde; Master d’Oc pour Doctor Dino. Il apparaît donc logique que Susan Magnier tente l’aventure avec un fils de Walk In The Park . L’homme qui aide John et Susan Magnier dans ce projet est Gerry Ahearn que j’ai rencontré : « Monsieur Magnier est un grand fan de Walk In the Park et nous réfléchissons à lui trouver un successeur. En observant la France, qui produit ses étalons, nous nous sommes dits : pourquoi pas nous ? Nous avons acheté la première année sept ou huit fils bien nés de Walk In the Park avec l’espoir que l’un d’entre eux devienne étalon. Qui sait ? Il faut tenter pour savoir ». Pourquoi acheter des foals ? « Notre priorité, c’est l’élevage. Nous sommes un haras, nous faisons saillir. Il fallait soutenir ceux qui envoient leurs juments à nos étalons. Nous achetions beaucoup aux ventes de stores, mais souvent, les vendeurs sont des pinhookers, pas des éleveurs. On a voulu revenir à la source, acheter des foals, les intégrer à notre système dès le début. Dans notre système, on les traite comme des chevaux de plat. Débourrés en octobre de leur année de yearling, travaillés l’hiver, puis mis au pré au printemps avant de revenir au travail pour être prêts à courir en France ». Pourquoi ne pas les courir soi-même ou les envoyer chez Willie Mullins ? « C’est une question de programme. Il aurait fallu attendre un an de plus. Et plus on attend, plus la fenêtre de carrière est courte, surtout en cas de blessure. En France, on peut viser un programme de printemps, et s’il y a un contretemps, on a encore l’automne. Il y a un programme pour les trois et quatre ans, ce qui n’existe pas en Irlande ou en Angleterre ». Les débuts sont prometteurs : Wild Bill Hickok et The Mighty Celt ont gagné, et Jolly Swagman s’est bien comporté. Pourquoi avoir choisi Noël George et Amanda Zetterholm ? « Je les ai rencontrés par hasard, le jour où Il Est Français a gagné à Kempton. Ils sont ambitieux, bons, comprennent notre projet et parlent anglais. Ils ont de super installations à Chantilly et ont prouvé qu’ils savent entraîner. Jusqu’ici, tout se passe bien ». Gerry Ahearn a fait un premier voyage à Auteuil : « Magnifique piste, très bon accueil. J’ai été surpris par le peu de monde, mais vu l’état des courses actuellement, ça se comprend. Le niveau des allocations est remarquable, même pour les maidens ». Et on peut dire que la casaque Magnier a déjà donné un coup de projecteur au programme d’obstacle français. Tout ce qu’on peut leur souhaiter, c’est bonne chance… et peut-être encore de nombreuses victoires à Auteuil !

QUI SAIT ? IL FAUT TENTER POUR SAVOIR.
Gerry Ahearn