Feel Good N°8 Mai 2025 | Page 112

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Ultralibéralisme
L’ opacité la plus complète règne sur le monde de l’ élevage international. Impossible de savoir combien un étalon a sailli de juments ou eu de poulains à l’ échelle mondiale. Impossible de savoir combien sont issus de l’ ICSI, une technique sur laquelle on n’ a pourtant aucun recul et qu’ il serait bon d’ évaluer sur le long terme... Au plan européen comme mondial, pas de statistiques disponibles sur le nombre d’ inséminations artificielles, de transferts d’ embryons... « Au stud-book Selle Français, nous avons fait le choix de la transparence, dit Bérengère Lacroix. Un éleveur qui veut connaître le nombre de saillies réalisées par un étalon peut trouver ce chiffre rapidement, de même que beaucoup d’ autres données.

« FINALEMENT, LES ÉTALONNIERS DONNENT DE MOINS EN MOINS DE PAILLETTES, CAR ILS CRAIGNENT DE PERDRE LA MAIN SUR LEUR GÉNÉTIQUE ET QUE LES PAILLETTES NON UTILISÉES ARRIVENT SUR LE MARCHÉ NOIR ».

Marc Spalart, directeur d’ Equitechnic
Photo d’ illustration
© Elise Fossard
# 8
Mais il n’ en va pas de même en Autriche, Pologne, Hongrie, et même en Belgique ou en Allemagne... On est dans le libéralisme poussé à l’ extrême. La Belgique a, par exemple, abandonné le certificat de saillie qui est nécessaire chez nous pour enregistrer un poulain. Le stud-book belge Z ne publie aucun indice de performance et accepte d’ inscrire des clones, contrairement aux stud-books suisse ou français. Même le contrôle de filiation par ADN n’ est pas une obligation internationale. L’ Afrique du Sud, par exemple, ne le pratique pas ». Marc Spalart est le directeur d’ Equitechnic, entreprise normande qui accueille des étalons pour congeler leur semence et pratique aussi l’ insémination et les transferts d’ embryons. Pour lui, l’ arrivée de l’ ICSI et la réduction du nombre de paillettes par dose de sperme sont les deux révolutions récentes du monde de l’ élevage. « Dans un éjaculat, il y a quatre ou cinq milliards de spermatozoïdes en moyenne, ce qui donne une centaine de paillettes. Au début, nous en recevions huit par dose, puis six, puis quatre, puis une seule... Ce qui implique d’ échographier les juments trois ou quatre fois par jour pour inséminer au moment le plus propice à la fécondation. Avec l’ ICSI, on coupe en plus les paillettes en huit afin de féconder plusieurs ovocytes le même jour. Finalement, les étalonniers donnent de moins en moins de paillettes, car ils craignent de perdre la main sur leur génétique et que les paillettes non utilisées arrivent sur le marché noir ».
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