DATA AU GALOP
CE N’ EST PLUS UNE COURSE, C’ EST UNE
LEÇON DE GESTION DE RYTHME, UN MODÈLE DE PROJECTION DE VITESSE.
Un départ en surrégime
Dès l’ ouverture des stalles, quatre chevaux, le mors aux dents, décident d’ imprimer une cadence suicidaire. Pas question d’ attendre que quelqu’ un d’ autre prenne ses responsabilités: les leaders mettent d’ emblée les gaz, traçant les 600 premiers mètres en 36” 48, avec des passages en dessous des 11 secondes sur 200 mètres. Des chiffres vertigineux pour un Groupe 1 sur le mile. Mais qui peut encaisser un tel tempo et espérer encore avoir du gaz pour les 600 derniers mètres? Personne. Ou presque.
Le piège des sprinters
Les animateurs de cette course folle, des chevaux sans doute plus sprinters que milers dans l’ âme. À 800 mètres de l’ arrivée, l’ écart est réel, mais le coût physiologique, fatal. Ils ont « fait le break », mais courent déjà vers une défaite certaine. Ils ne tiennent pas les 1 600 mètres, et la sanction est immédiate dans les 400 derniers mètres de la ligne droite.
Henri Matisse, la course dans la course
Pendant ce temps, un cheval reste de marbre: Henri Matisse, confié à un Ryan Moore serein, pointé à 28,58 mètres des leaders à 600 mètres du but. Une monte qui respire l’ intelligence de course: pas d’ affolement, pas de réaction aux premiers coups de théâtre, juste la foi dans le schéma prévu. L’ art du negative split( réaliser la deuxième partie de course plus rapidement que la première), version équine. Et puis vient le moment. À l’ instant où les leaders payent leur folie, Ryan Moore déclenche l’ accélération. Les données de tracking témoignent d’ un cheval qui allonge sans forcer, grignote mètre après mètre, comme un artiste qui termine son œuvre. Ce n’ est plus une course, c’ est une leçon de gestion de rythme, un modèle de projection de vitesse. Finalement, il l’ emporte en 1’ 33” 91, nouveau record de l’ épreuve et de la piste.
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