WAVE RADIO MAG 2025 Juin 2025 | Page 38

LE E-FOIL
SURF / Philo
LE E-FOIL

Une board sous tension?

Le e-foil apparaît sur la côte et dans les lacs: de l’ électricité pour surfer! Progrès? Hérésie? Nouvelle pratique sportive? Et si nous y pensions?
Texte Jeremy Raffet, surfeur et producteur du Goût de Penser Illustration El Zebro 1

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ai partagé cet automne ma première session avec un e-foil, un foil électrique. Entre 2 séries, j’ aperçois un type en boule à la surface de l’ eau. Immobile, il s’ approche de moi à une vitesse considérable! Il passe à 30 mètres et s’ arrête au large. À la série suivante, le type reprend sa posture fœtale, et fonce sur moi. Mieux placé, je commence à ramer. Il me rattrape, son e-foil se soulève, il me passe dans le dos et prend la priorité, en position fœtale, une télécommande à la main. Ça sidère. Ça énerve! Mais une fois l’ émotion passée, qu’ y a-t-il à penser? Le e-foil est-il un risque? Une hérésie? Un objet de consommation supplémentaire?
Est-ce du surf? Il serait tentant de dénigrer le e-foil en lui reprochant de ne pas être du « vrai surf ». Mais existe-t-il une authentique pratique du surf? Si l’ ancienneté et l’ origine devaient servir d’ aiguillon, le « vrai surf » n’ est certainement pas celui que nous pratiquons depuis à peine un siècle en Occident. Nos shortboards en polyester ne participent pas plus au « vrai surf » que le e-foil. L’ ancestrale pratique hawaïenne était un rapport à l’ océan mêlant croyances et politique. Si l’ origine et l’ ancienneté servaient à légitimer nos critiques et à justifier nos pratiques, il faudrait commencer par jeter nos boards en plastique et redéfinir un rapport sacré et commun à l’ Océan.
Une machine pour surfer? Il y a bien un marché du vélo électrique, de la trottinette électrique ou encore du skate électrique, pourquoi n’ y aurait-il pas un marché du surf électrique? Le prix d’ un tel engin oscille actuellement entre 7 000 et 15 000 €. La tendance semble être à l’ invasion de la technique dans la pratique du surf. D’ un côté, on produit des vagues sur-mesure dans des déserts et de l’ autre on motorise les boards. Le point commun est le refus de faire face à ce que la nature propose, le refus de se soumettre aux conditions de houle, de vent, le refus de faire l’ effort de ramer. Plus nous aurons besoin de technique pour surfer, moins nous éprouverons l’ océan: plus nous nous éloignerons de la vague!
Un besoin électrique? L’ avancée technique est-elle une fatalité? Est-ce juste que l’ on investisse dans la fabrication de nouveaux gadgets alors qu’ on ne sait toujours pas
1. Article consacré à l’ artiste page 78
Le Goût de Penser
CHRONIQUE PHILO Présentée par Jeremy
Le samedi à 10h
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