Cette atmosphère tendue fut entretenue par certains milieux musulmans fanatiques, à travers leurs journaux, qui publièrent des articles incendières visant à soulever les masses populaires contre les Arméniens. Au même moment, des graves incidents survinrent dans la ville voisine d’Alexandrette entre les membres de la Légion arménienne et la population musulmane locale. Ces nouvelles parvenues à Alep envenimèrent davantage la tension intercommunautaire. Finalement, cette campagne aboutit, le 28 février 1919, à un pogrom anti-arménien à Alep. La foule, accompagnée
de gendarmes et de soldats arabes, se rua dans la ville, à la recherche de réfugiés arméniens. Ces derniers s’abritèrent tant bien que mal dans la caserne et dans les orphelinats de la ville ; des maisons appartenant à des Arméniens furent pillées et détruites. La foule attaqua même le Khan Saboun où étaient hébergés des orphelins du pasteur Chiradjian. L’établissement subit d’énormes dégâts. Les massacres durèrent plusieurs heures et ne cessèrent qu’après l’intervention de l’armée britannique. Au total, cinquante Arméniens furent tués, cent cinquante blessés et de nombreux autres furent portés
disparus 75. Les Britanniques tirèrent la leçon de ces événements et décidèrent d’accélérer le rythme des rapatriements, pour éviter la reproduction de telles violences ailleurs.
Ces massacres portèrent un coup rude à l’action humanitaire qui se mettait en place au profit des déportés. Les organisations devaient de surcroît venir en aide aux victimes des pogroms. C’est précisément à cette époque que le comité local de l’Union se mit véritablement à l’œuvre. Reconstitué le 12 janvier 1919, il comprenait déjà cinquante-quatre membres, dont certains étaient originaires de la ville et d’autres issus de la déportation. La reprise des activités fut rapide, facilitée par l’augmentation, au cours des semaines suivantes, ...
Alep après la guerre : ville de tous les dangers pour les réfugiés arméniens
Pensionnaires du refuge de l’Union, avec les membres du Comité chargé de recueillir les femmes et les orphelins : de gauche à droite, Dikran Djiguerdjian, Gabriel Khandjian, le P. Haroutiun Yessayan entre deux officiers français, un religieux, Onnig Mazloumian, Manoug Sahaguian, Dr Khatchadourian. Alep, 1919 (Arch. B. Nubar/Paris).
Roupèn Hérian, Commissaire au rapatriement, chargé de la recherche des femmes et des enfants enlevés (Arch. B. Nubar/Paris).
L’UGAB et le problème des réfugiés arméniens (Video)