Il faut aussi noter que tout au long de la guerre, la fille du Dr Altounian, Nora, seconda efficacement le pasteur dans la gestion de l’orphelinat22. Au début, elle organisa les souscriptions en faveur de l’orphelinat au sein de la communauté arménienne. Lorsque le nombre des enfants protégés arriva à un niveau tel que ces secours ne suffisaient plus à assurer leur entretien, la jeune fille fit directement appel à Djemal. Ce dernier donna alors l’ordre à l’armée ottomane de ravitailler l’orphelinat en vivres, en pétrole et en bois. Mais l’acte le plus important fut la signature par Djemal d’un arrêté ordonnant aux autorités locales de ne plus entraver l’activité de l’établissement23.
On ne peut toutefois imaginer qu’une telle œuvre ait pu exister en territoire ottoman sans le soutien actif des Américains et des Allemands d’Alep. Le Suisse Zollinger, ancien consul d’Allemagne à Alep, joua justement le rôle d’intermédiaire entre les Américains, les Allemands et les Suisses, d’une part, et le pasteur Aharon Chiradjian, de l’autre, pour faire passer des fonds importants à l’orphelinat24. à la fin de la guerre, le nombre d’orphelins recueillis dans cet établissement s’élevait à environ 1 500 enfants 25. Il est intéressant de noter que toutes les tentatives du pasteur Chiradjian pour introduire un enseignement en arménien dans l’orphelinat rencontrèrent l’interdiction formelle des autorités jeunes-turques, la tolérance des autorités locales ayant manifestement atteint, en la circonstance, ses limites.
Sur la demande insistante de deux missionnaires allemandes, Schäfer et Beatrice Rohner, Djemal pacha leur accorda, fin décembre 1915, l’autorisation d’ouvrir un autre orphelinat à Alep, sous la supervision des autorités locales, également destiné à recueillir les enfants arméniens abandonnés. L’amélioration de l’état sanitaire de la ville fut l’argument principal avancé par les deux Allemandes pour convaincre le pacha d’accepter l’ouverture de cet établissement 26. ...
L’action de l’Union au lendemain de la guerre en Syrie, Liban, Palestine et Irak
Cour intérieure de l’orphelinat d’Alep, avec Nora Altounian, la fille du médecin, et A. Chiradjian (Arch. B. Nubar/Paris).
Les activités de l’UGAB au lendemain de la Première Guerre mondiale - Destin arménien (Video)