Ainsi , les interactions entre les systèmes orexigènes de l ’ hypothalamus latéral et les structures limbiques cérébrales permettent de conférer aux signaux alimentaires une valeur hédonique particulière en fonction de l ’ état nutritionnel et des expériences alimentaires mémorisées . Le couplage subtil entre valence hédonique des aliments et contrôle de la prise alimentaire à des �ins homéostatiques est illustré par l ’ évolution de la palatabilité des aliments qui diminue au cours du repas et participe ainsi au rassasiement . L ’ in�luence pathologique de l ’ abondance et la variété d ’ aliments hautement palatables est illustrée de manière caricaturale dans le modèle animal de la « diète cafeteria » où l ’ offre à volonté à des rats d ’ aliments gras et sucrés issus de l ’ alimentation occidentale entraı̂ne hyperphagie et obésité ( Mandenoff et al ., 1982 ). Des études d ’ imagerie cérébrale chez l ’ homme ont aussi montré que la présentation de stimuli contextuels associés à la prise de nourriture chez des sujets obèses entraı̂ne une activation de régions cérébrales impliquées dans les comportements compulsifs , comme le cortex orbitofrontal ( Volkow and Li , 2005 ). Chez certains individus , ces modi�ications de l ’ activité cérébrale sont associées à des sensations de désire intense ( craving ) pour la nourriture et à des troubles compulsifs totalement dissociés des besoins énergétiques ( Volkow and Li , 2005 ).
L ’ in�luence des états psychologiques ( dont le stress « perçu ») sur le comportement alimentaire est une notion triviale pour le clinicien . L ’ approche scienti�ique de cette problématique chez l ’ homme est dif�icile et a conduit à des résultats contradictoires le stress tendant , selon les études à augmenter ou réduire la prise alimentaire (« stress paradoxe »). Par ailleurs , en dehors de situations pathologiques , des stress psychologiques même modérés semblent augmenter les préférences pour les aliments palatables et à haute densité énergétique . Ainsi , l ’ exposition
à des événements stressants peut déterminer une déstructuration des repas et augmenter les épisodes de grignotage ( snacks ) ( Oliver and Wardle , 1999 ). Chez l ’ homme , les évènements perçus comme stressants ont plus souvent des effets orexigènes , surtout chez des sujets ayant effectués des régimes impliquant une restriction calorique importante ( Oliver and Wardle , 1999 ). Il est important d ’ envisager que la restriction alimentaire est en soi un comportement anti-physiologique et un stress ( Anderson et al ., 2002 ). Notamment , la restriction alimentaire engendrant un désir intense ainsi qu ’ une recherche compulsive de la nourriture avec perte de contrôle sur sa consommation est une caractéristique clinique cardinale de certains TCA . Ainsi lors de la restriction alimentaire , le contrôle conscient du comportement ingestif chez l ’ homme prend le pas sur les signaux physiologiques de la faim . Ce contrôle se révèle souvent inopérant et induit une hyperphagie réactionnelle à déclenchement souvent brutal . De façon similaire aux situations rencontrées en clinique , l ’ exposition répétée ( chronique ) au stress modi�ie les choix alimentaires en faveur des aliments palatables et énergétiquement denses aussi chez l ’ animal de laboratoire ( Pecoraro et al ., 2004 ). Ainsi , le stress conjugué à la restriction alimentaire est un facteur expérimental pouvant induire des hyperphagies chez l ’ animal ( Hagan et al ., 2002 ).
Plusieurs études épidémiologiques attestent aussi d ’ une co-morbidité importante entre les TCA et les troubles affectifs ( troubles de l ’ humeur ) et anxieux ( Wolfe and Maisto , 2000 ; Fairburn and Harrison , 2003 ; Kaye et al ., 2004 ; Godart et al ., 2007 ). Plus particulièrement , des traits de personnalité anxieux , dépressifs et une réactivité accrue aux événements stressants sont des caractéristiques fréquemment retrouvées chez les patientes présentant un TCA ( Godart et al ., 2000 ).
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