ReMed 2016 ReMed Magazine N°1 - Nervous System | Page 14

Ainsi, les interactions entre les systèmes orexigènes de l’ hypothalamus latéral et les structures limbiques cérébrales permettent de conférer aux signaux alimentaires une valeur hédonique particulière en fonction de l’ état nutritionnel et des expériences alimentaires mémorisées. Le couplage subtil entre valence hédonique des aliments et contrôle de la prise alimentaire à des �ins homéostatiques est illustré par l’ évolution de la palatabilité des aliments qui diminue au cours du repas et participe ainsi au rassasiement. L’ in�luence pathologique de l’ abondance et la variété d’ aliments hautement palatables est illustrée de manière caricaturale dans le modèle animal de la « diète cafeteria » où l’ offre à volonté à des rats d’ aliments gras et sucrés issus de l’ alimentation occidentale entraı̂ne hyperphagie et obésité( Mandenoff et al., 1982). Des études d’ imagerie cérébrale chez l’ homme ont aussi montré que la présentation de stimuli contextuels associés à la prise de nourriture chez des sujets obèses entraı̂ne une activation de régions cérébrales impliquées dans les comportements compulsifs, comme le cortex orbitofrontal( Volkow and Li, 2005). Chez certains individus, ces modi�ications de l’ activité cérébrale sont associées à des sensations de désire intense( craving) pour la nourriture et à des troubles compulsifs totalement dissociés des besoins énergétiques( Volkow and Li, 2005).
L’ in�luence des états psychologiques( dont le stress « perçu ») sur le comportement alimentaire est une notion triviale pour le clinicien. L’ approche scienti�ique de cette problématique chez l’ homme est dif�icile et a conduit à des résultats contradictoires le stress tendant, selon les études à augmenter ou réduire la prise alimentaire(« stress paradoxe »). Par ailleurs, en dehors de situations pathologiques, des stress psychologiques même modérés semblent augmenter les préférences pour les aliments palatables et à haute densité énergétique. Ainsi, l’ exposition
à des événements stressants peut déterminer une déstructuration des repas et augmenter les épisodes de grignotage( snacks)( Oliver and Wardle, 1999). Chez l’ homme, les évènements perçus comme stressants ont plus souvent des effets orexigènes, surtout chez des sujets ayant effectués des régimes impliquant une restriction calorique importante( Oliver and Wardle, 1999). Il est important d’ envisager que la restriction alimentaire est en soi un comportement anti-physiologique et un stress( Anderson et al., 2002). Notamment, la restriction alimentaire engendrant un désir intense ainsi qu’ une recherche compulsive de la nourriture avec perte de contrôle sur sa consommation est une caractéristique clinique cardinale de certains TCA. Ainsi lors de la restriction alimentaire, le contrôle conscient du comportement ingestif chez l’ homme prend le pas sur les signaux physiologiques de la faim. Ce contrôle se révèle souvent inopérant et induit une hyperphagie réactionnelle à déclenchement souvent brutal. De façon similaire aux situations rencontrées en clinique, l’ exposition répétée( chronique) au stress modi�ie les choix alimentaires en faveur des aliments palatables et énergétiquement denses aussi chez l’ animal de laboratoire( Pecoraro et al., 2004). Ainsi, le stress conjugué à la restriction alimentaire est un facteur expérimental pouvant induire des hyperphagies chez l’ animal( Hagan et al., 2002).
Plusieurs études épidémiologiques attestent aussi d’ une co-morbidité importante entre les TCA et les troubles affectifs( troubles de l’ humeur) et anxieux( Wolfe and Maisto, 2000; Fairburn and Harrison, 2003; Kaye et al., 2004; Godart et al., 2007). Plus particulièrement, des traits de personnalité anxieux, dépressifs et une réactivité accrue aux événements stressants sont des caractéristiques fréquemment retrouvées chez les patientes présentant un TCA( Godart et al., 2000).
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