Radioprotection No 59-3 | Page 24

L . Vaillant : Radioprotection 2024 , 59 ( 3 ), 164 – 172 167
Tableau 1 . Doses maximales admissibles pour les travailleurs et limites de dose pour le public , Publication 9 de la CIPR ( 1966b ).
Travailleurs
Public
Gonades , moëlle osseuse
5 rems par an ( 50 mSv )
0,5 rem par an ( 5 mSv )
Exposition uniforme corps entier
5 rems par an ( 50 mSv )
0,5 rem par an ( 5 mSv )
Peau , thyroïde , os
30 rems par an ( 300 mSv )
3 rems par an ( 30 mSv )
Mains , avant-bras , pieds , chevilles
75 rems par an ( 750 mSv )
7,5 rems par an ( 75 mSv )
Autres organes
15 rems par an ( 150 mSv )
1,5 rems par an ( 15 mSv )
4 Comparaison des risques comme base de la définition des limites de dose
La Publication 26 de la CIPR ( ICRP , 1977 ) a établi les bases du système de radioprotection actuel . La Commission distingue les effets stochastiques , dont la probabilité augmente avec la dose ( et sans seuil ) ( Laurier et al ., 2023 ) et les effets non stochastiques , dont la sévérité augmente avec la dose , pour lesquels il peut y avoir un seuil . Les effets affectant l ’ individu exposé sont dits somatiques , les effets affectant la descendance de l ’ individu exposé sont dits héréditaires . Le système de radioprotection vise à prévenir les effets non stochastiques et à limiter le risque d ’ effet stochastique à un niveau raisonnable . Le premier objectif est atteint en fixant des limites de dose à un niveau suffisamment bas pour ne pas atteindre le seuil , même après une exposition vie entière . Le second objectif est atteint en maintenant toutes les expositions justifiées à un niveau aussi bas que raisonnablement possible sous les limites , en tenant compte des facteurs économiques et sociaux . La Commission introduit le concept de détriment pour quantifier les effets délétères associés à une exposition aux rayonnements ionisants . À des fins de radioprotection , la Commission estime que le risque de décès associé aux cancers est de 1 10 �2 Sv �1 et que le risque d ’ effets héréditaires sévères est de 0,4 10 �2 Sv �1 .
Dans la Publication 26 , la Commission propose ( pour les travailleurs exposés ) de juger de l ’ acceptabilité du risque associé à une exposition en comparant ce risque à celui observé dans des industries ayant des normes de sécurité perçues comme élevées . Dans les industries sûres , le risque annuel de décès est en moyenne inférieur ou égal à 10 �4 . Ainsi , la Commission estime que le taux moyen calculé auquel des tumeurs malignes mortelles pourraient être induites par l ’ exposition professionnelle aux rayonnements ne devrait pas dépasser 10 �4 , soit environ 5 mSv . La Commission estime que la mise en œuvre de ses recommandations se traduit par l ’ exposition moyenne pour les travailleurs égale au 1 / 10 e de la limite . À ce sujet , Steward explique « Dans des branches particulières comprenant un nombre élevé de travailleurs auxquelles s ’ appliquent les recommandations de la Commission , la distribution en fréquence des doses reçues est bien représentée par une fonction de distribution lognormale caractérisée par un écart-type géométrique de 2,5 ou plus . Les limites de dose sont rarement dépassées , la fréquence étant de l ’ ordre de 10∼3 . Si l ’ on suppose que cette fréquence correspond aux limites de dose dans la distribution , alors le rapport de la limite de dose à la dose moyenne du groupe sera au moins de dix » ( Steward , 1978 ). À partir de ces considérations , la Commission recommande , pour les travailleurs , une limite de dose annuelle de 50 mSv . Il est important de souligner ici que si la limite de dose pour les travailleurs est fixée à 50 mSv par an , la dose jugée acceptable ( et donc l ’ objectif de protection ) pour un travailleur est de 5 mSv . La Commission reconduit donc la limite de dose de la Publication 8 , mais en s ’ appuyant sur un argumentaire différent . La Commission estime que les effets non stochastiques peuvent être évités en appliquant une limite de dose annuelle équivalente à chaque organe de 0,5 Sv , à l ’ exception du cristallin ( 0,3 Sv ). Pour les effets stochastiques , la Commission recommande un système de limitation de la dose fondé sur le principe que le risque doit être identique que le corps soit irradié uniformément ou non . L ’ objectif de limitation est atteint si :
X W T H T H Wb ; L
T
Avec w T facteur de pondération qui représente la contribution de l ’ organe T au détriment , H T la dose annuelle équivalente à l ’ organe T , H wb , L la limite annuelle de dose recommandée pour l ’ exposition uniforme corps entier ( 50 mSv ).
Pour juger du caractère acceptable du risque d ’ occurrence d ’ un effet stochastique pour le public , la Commission s ’ appuie sur le constat que le niveau d ’ acceptabilité des risques létaux pour le public est un ordre de grandeur inférieur à celui des risques professionnels . Un risque de l ’ ordre de 10 �6 à10 �5 par an est ainsi jugé comme probablement acceptable pour un membre du public , soit une dose de l ’ ordre de 0,5 mSv par an . Sur cette base , la Commission recommande une limite de dose de 5 mSv . an �1 pour le public . Ainsi , comme indiqué par Sugier « La comparaison des risques liés a ces doses avec ceux de la vie courante permet de juger de leur acceptabilité : le niveau de risque est comparable , pour les travailleurs a celui des professions les plus sûres , et pour les personnes du public a celui de la vie de tous les jours »( Sugier et al ., 2005 ).
5 Introduction du modèle de tolérabilité du risque
En 1990 , la CIPR élabore à nouveau des recommandations générales ( ICRP , 1991 ). L ’ objectif du système de radioprotection est réaffirmé , ainsi que les 3 principes fondamentaux : – justification d ’ une pratique : aucune pratique impliquant une exposition aux rayonnements ne devrait être adoptée , à moins qu ’ elle ne produise un bénéfice suffisant pour les individus exposés ou pour la société afin de compenser le préjudice radiologique qu ’ elle cause ;