LA PLUME DES EONS
- Vous êtes absolument taré ! beugla le général qui cherchait une porte
de sortie inexistante.
- Remarque amusante venant de celui qui comptait liquider tout son
personnel, ne laisser aucune trace et repartir avec les plus grandes richesses qui puissent être maintenant. A propos, j’ai désactivé les explosifs.
Gunmann m’avait appris quelques astuces pour ce genre de choses.
- Parlez pour vous, Twilight. C’est vous qui les avez assassinés.
- C’est bien que vous arriviez à admettre la chose, dit-il. Vous pourriez
même m’en remercier, non ? Je l’ai fait parce qu’ils ne valaient pas mieux
que vous, pour la plupart. Vous me preniez pour un idiot, à m’obliger à
falsifier mes rapports pour ordonner des permutations stupides ? Toutes
ces morts accidentelles ? Beau coup de filet. Rassembler tous ceux qui
vous gênaient pour les faire mourir ensuite et paraître blanc comme neige...
J’aurais du être le premier sur la liste, n’est-ce pas ? Je crois que j’ai bien fait de ne pas boire mon breakfast. Il avait comme une odeur de ciguë. Et je suis triste de croire que l’enquête sur mon décès accidentel
n’aurait pas duré longtemps. »
Rockwell le foudroya des yeux avec un rictus mauvais, avant de finir par éclater d’un rire désabusé.
“ Je savais qu’on aurait jamais du laisser un psychiatre de merde en place. Je ne sais pas pour vos connaissances ou vos talents, mais vous avez de drôles de ressources pour un civil.
- Psychologue, rectifia Ash sans se froisser. Et la clinique n’est qu’une partie de mes attributions.
- L’un ou l’autre ne sont pas censés guérir leur patient en les tuant, je croyais. Pas que vous serviez vraiment à quelque chose, même si vous étiez recommandé par certains gros bonnets…
- Un général peut sacrifier ses troupes à l’envie, apparemment. Dites-moi, Rockwell, vous avez peur de
mourir ? Peur de la dernière petite étincelle de conscience avant que les ténèbres ne s’abattent sur vous ? »
Le traître ricana.
“ Ne me faites pas dans le registre des questions à la con. Si vous vouliez me tuer, je ne serai pas là.
- Faux, répondit doucement Ash. Vous n’avez pratiquement aucune valeur pour moi. J’ai tous les documents
qu’il me faut, même si j’aurais aimé avoir plus de détails sur Shangrila.
- Oh ? fit Rockwell sans s’émouvoir, en se déplaçant imperceptiblement sur le sable. Vous êtes un de ces
personnages de roman pour niaiseux qui aime faire sentir à sa victime tout le poids de ses péchés ? Vous pouvez toujours courir, Twilight, si vous attendez que je me repente pour avoir voulu sauver ma peau. Celui qui a
du sang sur les mains, c’est vous.
- Je n’aurais pas attendu autant d’esprit de votre part, général, en tout cas, je ne vous aurai pas réservé
cet honneur. Non, je voulais simplement vérifier de visu les effets du traitement sur un sujet vivant, en direct.
On me tenait étonnamment éloigné des expériences.
- Vous m’avez inoculé ? “ croassa Rockwell en pâlissant.
Et comment ! Comme tant d’autres avant lui. Il allait goûter à la propre médecine que lui et ses pairs
avaient voulu s’accaparer. Il avait fallu être d’une idiotie sans pareille pour ne pas remarquer que les spécimens
1 et 2 ne pouvaient pas être utilisés comme arme de guerre, à moins de vouloir ouvrir la boîte de Pandore.
Ash hocha la tête sans mot dire; le gradé le traita d’une ribambelle de noms qui ne feraient pas plaisir à ses
ancêtres, avant de tenter de se jeter sur lui. Seulement, après plusieurs heures passées sans boire ni manger,
dans la chaleur étouffante d’un sac comprimé, on n’est pas au summum de la forme.
Ash le repo