Optique singulière DOSSIER polarisation dans un plan peut être étudiée expérimentalement de manière simple et variée, par exemple en faisant se propager un faisceau Gaussien à travers un milieu biréfringent, homogène ou non, et en mesurant l’ état de polarisation en sortie.
Pour finir, un dernier exemple du caractère naturel des singularités de polarisation et des structures électromagnétiques qui en résultent mérite d’ être mentionné: il s’ agit de la lumière venant du ciel. Il existe quatre directions d’ observation, ou points neutres, où l’ ellipse de polarisation elle-même est indéterminée. La lumière y est complètement dépolarisée. Deux de ces points singuliers sont situés à proximité du Soleil, et les deux autres correspondent à des directions opposées. Remarquablement, si trois de ces points ont été observés dans la première moitié du xix e siècle, la signature topologique générique du champ de polarisation dans leurs voisinages ainsi que le 4 ème point neutre n’ ont été identifiés expérimentalement qu’ aux alentours des années 2000, voir à la Figure 3( c).
Nous avons vu que les singularités optiques, de phase ou de polarisation, ne constituaient pas des propriétés topologiques exotiques de la lumière. Au contraire, elles en constituent en quelque sorte le squelette. Ancrées dans les phénomènes lumineux qui nous entourent depuis toujours, elles continuent d’ être apprivoisées au bénéfice d’ applications toujours plus nombreuses. Dans ce qui suit, nous allons présenter quelques technologies de mise en forme des singularités optiques ainsi que certaines avancées qui ont particulièrement stimulé des développements qui restent toujours d ' actualité.
TECHNOLOGIES PHOTONIQUES SINGULIÈRES La production d ' éléments optiques permettant de transformer une onde « régulière » en une onde « singulière » de façon contrôlée remonte à plus de 50 ans. En effet, Bryngdhal mentionne en 1973 la fabrication de masques de phase hélicoïdaux en exploitant les changements d ' épaisseur optique d’ émulsions photographiques. Ces lames de phase spiralées présentent une transmittance complexe de la forme e iαϕ où ϕ est l’ angle polaire dans le plan de la lame et α un réel qui dépend de la longueur d’ onde. Ainsi, en prenant soin de choisir α = l ∈ Z *, on peut générer des singularités de phase de charge topologique l à la demande.
Cependant, l’ intérêt pour ce type de dispositifs n’ a suscité un intérêt concret que 20 ans plus tard, grâce à un travail d ' Allen et al. en 1992. Les auteurs y interprètent de manière mécanique( classique et quantique) le terme de phase e ilϕ caractéristique des faisceaux de Laguerre-Gauss, comme le rappelle la Figure 2( c). Ce terme est associé à l’ existence d’ un moment angulaire de nature orbitale, distinct du moment angulaire de spin associé à l’ état de polarisation. Ainsi, un faisceau de Laguerre-Gauss porte un moment angulaire orbital de lħ par photon le long de la direction de propagation, où ħ est la constante de Planck réduite, qui s’ ajoute au moment angulaire de spin de σħ
PHASE DYNAMIQUE ET PHASE GÉOMÉTRIQUE
De manière imagée, la phase dynamique, Φ dyn, correspond à l’ horloge interne d’ une onde lumineuse, dont l’ évolution dans un milieu isotrope dépend de la fréquence angulaire ω, du temps t, de l’ indice de réfraction N du milieu de propagation via le vecteur d’ onde k = Nω / c où c est la vitesse de la lumière dans le vide, et de la distance de propagation z dans le milieu. De plus, dans un milieu isotrope, cette phase est indépendante de l’ état de polarisation de la lumière. En revanche, la phase géométrique, Φ geo, dépend de la structure du chemin parcouru dans un espace de paramètres. Dans le cas d’ une onde lumineuse se propageant dans un milieu anisotrope associé à des indices de réfraction distincts pour un champ électrique oscillant selon l’ une ou l’ autre des deux directions principales du milieu( voir les double-flèches en trait plein et pointillé), ces paramètres sont l’ orientation de l’ axe d’ anisotropie, Ψ, et l’ état de polarisation de la lumière. Dans ce cas, la moyenne et la différence des vecteurs d’ ondes qui correspondent aux directions principales du milieu sont respectivement associées à la phase dynamique et au retard de phase associé à la biréfringence, ∆. Les flèches rouges et bleues illustrent des états de polarisation circulaire d’ hélicité opposée et leur sens de rotation indique celui du champ électrique en fonction du temps à un endroit donné.
Photoniques 132 I www. photoniques. com 35