Montréal pour Enfants vol. 23 n°2 / Printemps 2023 | Page 26

La tendance de certains professeurs à utiliser le travail d ’ équipe surtout pour gagner du temps de correction reste encore bien réelle , confirme Isabelle Nizet , et elle pense que cette tendance s ’ accentue surtout à partir du secondaire : « Et c ’ est ce qui fait que le travail d ’ équipe a mauvaise presse . On se dit que ça fait bien l ’ affaire de l ’ enseignant , mais on ne voit pas ce que cela apporte aux élèves . »
D ’ abord , instaurer l ’ ambiance …
Mélanie Dumouchel demeure convaincue qu ’ en s ’ engageant auprès de ses élèves et en apprenant à les connaître , les professeurs se donnent les moyens de parvenir à former des équipes mieux rodées qui atteindront plus efficacement leurs visées : « On fait des jeux libres . On change les équipes . Ce n ’ est pas une perte de temps , parce que le sentiment de cohésion qu ’ on est en train de développer fait en sorte que durant les travaux d ’ équipe , je retrouve ce souci de l ’ autre qui va pouvoir s ’ investir dans le côté plus académique . Ils ne travailleront pas nécessairement plus vite , mais plus dans le respect . Ils vont s ’ entraider davantage et travailler mieux . »
Cette chercheuse , auteure du livre La gestion de la classe intégrée aux didactiques , croit donc à l ’ importance de préparer le travail d ’ équipe , mais aussi de solliciter l ’ esprit de collaboration bien avant de se mettre en groupe . Selon elle , cet esprit doit faire partie des valeurs de la classe en tout temps et même , idéalement , de celles de l ’ école , par des conseils de coopération sur des sujets proposés par le professeur ou , encore mieux , amenés par les élèves . Mélanie Dumouchel a déjà vu des élèves prendre l ’ initiative de demander de tels moments de négociations dès la maternelle , afin de mieux se départager les jouets à la récréation : « Il faut aussi enseigner la résolution de conflits avec les élèves . On parle de ce qui ne va pas bien dans la classe en conseil de coopération . Alors je me dis qu ’ ils ont l ’ habitude de travailler ensemble . Ils ont l ’ habitude de se dire ce qu ’ ils apprécient et ce qu ’ ils aiment moins . »
Par de tels échanges , les élèves peuvent contribuer à améliorer leurs compétences sociales , mais aussi aller chercher le meilleur de leur enseignant . En effet , les expertes rencontrées mentionnent qu ’ aucun cours particulier n ’ est proposé , à l ’ intérieur du programme de formation de leur université , pour apprendre aux futurs enseignants à mener à bien l ’ objectif ministériel de la collaboration en équipe , et que les meilleures pratiques en ce domaine sont encore à définir . Isabelle Nizet croit néanmoins que ces étudiants se font enseigner comment entretenir un climat de classe sain : « Donc , je suis persuadée qu ’ ils apprennent des méthodes d ’ animation , de dynamique d ’ équipe , de dynamiques psychosociales qui sont les bases du travail d ’ équipe pour un pédagogue . »
S ’ ÉQUIPER DE TEMPS ET DE PATIENCE
Le travail d ’ équipe réellement collaboratif est donc une source d ’ écoute et d ’ apprentissage , tant pour les élèves que pour les professeurs . Et dans ce contexte , faute de rivaliser tout court , il faudra donc rivaliser de patience , et se donner les outils pour distinguer les vraies avancées des fausses réussites .
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