Montréal pour Enfants vol. 20 n°4 / La rentrée scolaire 2020 | Page 32
cepter de perdre du temps, d’être à côté
de lui et lui donner une petite tape dans le
dos, sans raison précise, de le regarder et
de lui faire un clin d’œil. »
Chantal Martel soutient toutefois que les
excuses et la réconciliation ne devraient
pas viser seulement de se donner l’occasion
de passer à autre chose le plus vite
possible. Il serait même dommage de rater
ce moment de prise de conscience. Pour
le parent aussi il est important de mettre
des mots sur son inconfort : « Si je fais une
erreur qui éveille ma culpabilité, si je me dis
“C’est correct, on ne culpabilisera pas”, je
dois quand même rester disponible à l’enfant.
Est-ce que les besoins de mon enfant
sont comblés ? Si je me rends compte qu’il
aurait eu besoin de plus de sensibilité de
ma part, je peux faire réparation. Je peux
voir si je devrais aller chercher de l’aide ou
prendre un moment de répit. »
POUR LES PETITS ET LES
GRANDS APPRENANTS
Et s’il n’est ainsi jamais trop tôt pour s’excuser,
Mélodie Bilodeau croit qu’il n’est jamais
trop tard non plus. Des livres savants
répètent depuis belle lurette que « Tout se
joue avant 5 ans » ; elle n’en garde pas
moins la conviction que ce sont les erreurs
jamais admises qui créent le plus de dommages
: « Un parent peut à 35 ou à 40
ans dire à son enfant : “Oui, cette situation,
tu l’as encore sur le cœur. Écoute, je
suis désolé. C’est vrai que ce jour-là, je n’ai
pas été juste avec toi. Je m’en excuse.” Je
pense que même à 40 ans ça vient réparer
quelque chose. »
Pour reconnaître et mieux accepter que
les parents ne sont pas parfaits, Mélanie
Bilodeau leur rappelle que l’on ne
doit pas se sentir coupable d’apprendre.
Elle reconnaît toutefois que c’est souvent
plus tard, lorsque les parents prennent
conscience d’avoir acquis des réflexes
qui leur semblent plus adaptés, rendus
au deuxième ou au troisième enfant, par
exemple, qu’ils se mettent à regretter leurs
maladresses d’avant.
Annie Paquet rétorque cependant à cela
qu’il faudrait éviter de remuer le couteau
dans la plaie pour chaque bon coup que
l’on n’a pas su faire avant, puisque adapter
ses valeurs et ses connaissances à la particularité
de chaque situation reste le défi
de toute une vie : « Ce n’est pas parce que
c’est différent que notre première façon de
faire était nécessairement une erreur. À ce
moment-là, c’était ce que l’on croyait être
bon. Ce qu’agir différemment aurait pu
donner, on ne sait pas. Est-ce que c’était
vraiment une erreur ? C’est un apprentissage
en tant que parents. Si tu as un enfant
de trois ans, comme parent, tu as trois
ans d’expérience aussi. Tu n’en as pas
20. Comme on se disait : il faut se donner
le droit à l’erreur. Et si chaque enfant est
unique, chaque parent est unique aussi.
Chaque situation et même chaque journée
est unique aussi. »
DE SUCCÈS EN SUCCÈS, ON
DÉCULPABILISE
Daniela a pu voir l’effet bénéfique d’une
simple respiration sur la gestion de ses angoisses.
Elle a alors appris quelque chose
d’encore plus fondamental : qu’elle était
capable de trouver des moyens de maintenir
la communication, même dans les
moments difficiles. Car si, d’un côté, le fait
de se sentir moins compétent multiplie les
moments de culpabilité, il semblerait que
de constater que l’on a bien décodé son
enfant permettrait aux parents de revenir
plus rapidement à un état paisible et compatissant
: « Ce sont des mécanismes
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