Montréal pour Enfants vol. 18 n°3 Été 2018 | Page 36

36 psychologie www.montrealpourenfants.com "Moi, je veux donner toutes ses chances à mon enfant." Mais en ce qui concerne les traitements de l’autisme et des troubles envahissants du développement, on trouve tout et n’importe quoi. » Les contraintes d’une vie familiale ponctuée par les rendez-vous médicaux ou les entraînements peuvent aussi, selon Marc Lanovaz, affecter d’autres personnes, en dehors de la fratrie et du cercle familial : « Certaines familles avec lesquelles on travaille disent qu’elles réduisent le nombre de sorties, car elles ne veulent pas sortir avec un enfant qui s’agite lorsqu’il est en public.» Bien que le courage des parents qui accompagnent leurs enfants aux parcours particuliers puisse susciter l’admiration, ceux que rencontre le professeur en psychologie à l’Université d’Ottawa, Jean-François Bureau, semblent souvent vivre une expérience teintée de culpabilité  : «  Le parent qui doit s’adapter à un enfant qui est aux soins intensifs ou qui doit aller chez le médecin régulièrement, et dont la vision du parent idéal est de partager son temps de façon égale entre tous ses enfants, va se sentir extrêmement coupable de ne pas en donner autant aux autres. Est-ce que cette culpabilité peut devenir un frein à l’ensemble des relations  ? Je pense que oui. Et les enfants sentent très bien le malaise de leurs parents. » Carl Lacharité remarque qu’un diagnostic et un encadrement sont loin de mettre un terme à la pression que subit la famille. La manière de bien répondre aux besoins de son enfant demeure modulée par les sources d’informations disponibles, que ce soit sur Internet, dans les groupes d’entraide ou dans l’entourage. Celles-ci encouragent souvent à se fier aux savoirs des experts qui ne s’entendent pas toujours non plus : « Je peux être la mère de Sébastien devant l’éducateur spécialisé qui vient chez moi trois soirs par semaine. Mais je ne suis pas tout à fait la même lorsque je rencontre le médecin ou une infirmière, ou quand je suis seule avec mon enfant. Quand je suis seule avec lui, je ne suis jamais complètement seule, parce qu’il y a toujours quelqu’un qui m’a dit : “Quand tu seras seule avec ton enfant, il faudrait que tu fasses telle ou telle chose." Même la relation entre le parent et l’enfant devient encombrée. » Véronique Richard, pour sa part, observe également la pression que les parents peuvent s’imposer entre eux, quant à la façon de laisser toutes les chances à leur athlète  : «  C’est naturel chez l’humain. On va toujours aspirer à devenir le meilleur dans notre entourage. Si le meilleur a une attitude positive, on fait une association qui est assez saine  : cela veut dire que si j’adopte cette attitude, cela va me mener à ce succès. Malheureusement, la même logique s’applique aussi si un parent crie tout le temps ou met de la pression sur l’enfant.  » Forte de cette expérience, madame Richard participe à la création d’ateliers pour Patinage Canada, afin d’aider les parents : « On oublie souvent de donner un peu plus de soutien aux parents. […] Il faut que les parents soient capables de prendre conscience de leurs comportements face au sport, face au reste de la famille, et des comportements qui sont moins productifs. » Heureusement pour les sportifs, les connaissances pour soutenir l’excellence ne cessent de s’accumuler, tant sur ce dont le corps a besoin que sur ce que chaque corps est capable d’offrir comme performance  : «  On est capable de décortiquer chaque sport et ses composantes de nos jours », rapporte Robert Dubreuil, directeur général de la Fédération de patinage de vitesse du Québec. Et, il semblerait que ces connaissances puissent également avoir des retombées pour les familles qui se retrouvent confrontées à un diagnostic de limitation. C’est d’ailleurs le prochain projet sur lequel travaillera Christiane Trottier, professeure et chercheuse en psychologie du sport à l’Université Laval  : «  Comme, en psychologie du sport, je travaille plus sur les habiletés et les attitudes positives des jeunes, l’idée est de faire le parallèle entre l’athlète d’élite, qui peut avoir des besoins aussi, et un enfant vivant des incapacités. »