P RÉFACE
PAR LE DOCTEUR GÉRARD CHAPUT M ÉDECIN M ILITAIRE ( ER)
PRÉSIDENT DES SENTINELLES DE LA NATION
CO-CONCEPTEUR DE LA DENSIFICATION DE L’ÊTRE
CROSSOPS pour se préparer à affronter
les situations opérationnelles difficiles et chaotiques.
Chacun a entendu parler de nouvelles activités sportives ayant le
vent en poupe chez nos jeunes générations. Ces nouvelles pratiques
sportives ont intéressé les forces spéciales, les forces de sécurité, les
militaires. C’est par la synthèse entre les méthodes traditionnelles et
les nouvelles pratiques, ainsi que les techniques militaires, qu’est né
CROSSOPS qui propose un protocole de préparation physique pour
des unités opérationnelles.
L’objectif de la Préparation Physique Opérationnelle est de développer
les aptitudes physiques et mentales des opérationnels de manière
efficiente et de les préparer de façon optimale, dans n’importe quel
environnement, avec ou sans matériel à disposition.
En alliant l’intensité des entraînements, la force, l’endurance et la
souplesse, ce nouveau type d’activité génère des bienfaits inestimables
pour ces unités spécialisées leur permettant d’atteindre rapidement
des sommets inégalés dans le domaine de la préparation physique.
S’il faut se réjouir de tous ces avantages, il convient malgré tout de rester
vigilants. Tout d’abord parce que la pratique d’une activité physique
intense peut générer des blessures surtout si l’échauffement musculaire
préalable a été insuffisant. Mais aussi et surtout, parce qu’en cas de
pratique solitaire sans la supervision d’un entraîneur, l’exécution des
exercices peut vite déraper. C’est le cas des exercices complexes hyper
techniques. Les corps sont alors soumis à des contraintes majeures que
le sujet ne maitrise pas forcément. Le risque de blessure est important.
Que dire des pratiques si intensives qu’elles en deviennent quasi
addictives et qu’elles sursollicitent les corps pour les sublimer jusqu’à
parfois la maltraitance. Est-ce bien raisonnable ? Dompter les corps ou
les asservir sont les deux mâchoires d’un même piège.
Prenons une comparaison pour illustrer notre propos. Il n’y a pas de
différence notable entre se défoncer (en langage commun on dirait « se
shooter ») et faire un marathon ? les deux pratiques génèrent de la
morphine. Lors d’un marathon, l’organisme sécrète des endorphines et
celui qui se dope (se drogue) assimile de la morphine exogène.
Mais à y regarder de plus près, la différence est notable.
N’oublions pas que le premier des marathoniens avait un objectif
opérationnel. C’était le messager grec Philippidès. Il avait une mission.
Il avait (aurait) parcouru la distance de Marathon à Athènes pour
annoncer la victoire contre les Perses en 490 av. J.-C.
Le sens de sa pratique sportive est donné par la mission : annoncer aux
athéniens la victoire. En se " shootant ", l’individu qui se
drogue ne vise que la jouissance
immédiate d’un plaisir personnel
toujours à renouveller.
En se dopant par une pratique sportive
intensive qui n’est pas orientée vers la
missison, l’individu se dupe.
S’engager à une pratique sportive
intense telle que la propose CROSSOPS,
suppose de donner du sens à son
entraînement. Un sens qui ne soit ouvert
uniquement sur soi, sur son image mais
qui soit aussi et surtout relation à autrui. Sinon le risque est grand pour
ces pratiquants de sombrer dans l’addiction car ne l’oublions jamais, le
cerveau est un excellent manipulateur. Il est particulièrement addict au
plaisir.
Comment éviter ces pièges ?
Comment construire ses entraînements pour les optimiser et leur
donner du sens ?
S’entraîner pour faire face aux situations difficiles et / ou chaotiques
suppose de prendre en compte l’homme dans son unicité.
L’être doit être envisagé comme un tout au sens de la philosophie
grecque : sarx, soma, psyché, comme une unité d’être : corps, esprit
et âme.
Il s’agit d’apprendre par l’effort, par la pratique du CROSSOPS à se
densifier c’est-à-dire, dans un champ anthropologique, de développer
un sens complet de l’être humain.
La densification de l’Être par la pratique du CROSSOPS vise à permettre
à " l’homme de résister aux conséquences néfastes des stress
engendrés par les conditions rencontrées sur le champ de bataille ou
dans la vie ordinaire (…) Dans les armées occidentales professionnelles
où la ressource humaine est difficile à recruter, à former et à fidéliser,
comment agir pour que le soldat surmonte ses blessures psychologiques
et soit apte au réengagement opérationnel ? " 1
Delaisser l’un de ces aspects est propice à générer un déséquilibre
potentiellement traumatisant en situation de stress dépassé.
6 7
1 - Venard (G.), Legrier (F.-R.), Chaput (G.), Venard (C.), " Améliorer la préparation
psychologique du combattant : Le principe de densification ", Inflexions n° 12
" Le corps guerrier , La Documentation française, Paris, Octobre-Décembre 2009.