HISTOIRE & PATRIMOINE - Hors-Série n° 16 - octobre 2023 HISTOIRE & PATRIMOINE - Hors-Série n° 16 - octobre 2023 | Page 12

L ’ inquiétude se répand parmi les habitants qui n ’ entendent pas céder . Une nouvelle épreuve de force se profile , mais qui n ’ eut pas lieu en raison de l ’ intervention d ’ acteurs nouveaux et principalement de Napoléon III .
L ’ intervention de Napoléon III ( 1853-1858 )
L ’ inquiétude face à la levée prochaine de la taxe de plus-value
Les curés se font le relais auprès du préfet et de l ’ évêque de l ’ inquiétude qui gagne les habitants des communes . Le 24 janvier 1853 , le curé de Pontchâteau dénonce l ’« énorme indemnité » réclamée par la Compagnie de Bray . Il se fait d ’ abord le porte-parole de ses ouailles qui sont victimes d ’ une demande « souverainement injuste », car ils n ’ ont pas porté atteinte « à la jouissance des marais appartenant la Compagnie » et n ’ ont jamais provoqué « le moindre empêchement à ses travaux ». Le curé se fait également l ’ écho du mécontentement qui gagne les communes concernées . Il rapporte la rumeur selon laquelle , dans certaines communes , il a été lancé un appel à la destruction des travaux du dessèchement , menace qui n ’ est pas mise à exécution puisque , selon lui , le sermon pacifique qu ’ il prononça « a porté ses fruits » et dissuadé toute velléité de désordre 46 . Le 14 avril , M gr Jaquemet en réfère au préfet dans une lettre où il fait état du « malheur » qui « menace aujourd ’ hui huit ou dix communes de ce département , puisque la plus-value va être levée et avec elle , l ’ intérêt de cette plus-value depuis 28 ans », ce qui , ajouté à d ’ autres demandes de la Compagnie de Bray , aura pour résultat de « réduire à la dernière misère , et pour toujours , plus de 30 000 personnes 47 ». Le 1 er mai , les maires de Saint-Joachim , de Crossac , de Besné , de Sainte-Reine et de Pontchâteau s ’ adressent également au préfet . Ils affirment que la levée de la taxe de plus-value aura pour effet « sinon à une profonde misère , du moins un état de gêne , dont beaucoup ne se relèveront pas ». Ils dénoncent l ’ iniquité de cette taxe (« Si la compagnie avait rempli ses engagements , si les marais avaient été réellement desséchés , ces malheureux se résigneraient ») et sa dangerosité : la paix publique pourrait en être affectée . Aussi afin qu ’ il se rende compte de la gravité de la situation , demandent-ils au préfet de venir sur les lieux . Le 12 mai , le préfet est à Pontchâteau où il passe deux jours . Il fait savoir aux maires et à quelques notables que le droit de la Compagnie de Bray à lever une taxe de plus-value ne peut pas lui être contesté , qu ’ il n ’ est pas possible que le gouvernement annule ou modifie les décisions rendues en Conseil d ’ État , mais il indique que l ’ empereur porte un « l ’ intérêt particulier » à l ’ affaire et qu ’ une négociation , à laquelle il est associé , est engagée avec la Compagnie en vue d ’ obtenir un « adoucissement dans l ’ exercice des droits des dessécheurs ». Au terme de sa visite , il se dit convaincu de pouvoir « pacifier les esprits ». Mais l ’ inquiétude demeure . Le 14 mai , Guichet , ancien maire de Montoir s ’ interroge : « comment les malheureux riverains parviendront-ils à payer les plus-values qu ’ on exige d ’ eux ? ».
46 - Ibid ., 1768 S 5 . Voir également l ’ opinion de l ’ abbé Allain , curé de Crossac , Gallicé , Alain , Histoire et patrimoine , Association préhistorique et historique de la région nazairienne , hors-série n ° 13 , mai 2019 , p . 127-147 .
47 - Arch . dép . Loire-Atlantique , 1772 S 1 , pour tout ce qui suit .
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