egard noir le déprimait.
– Et il a un nom ce prince charmant ?
– Louis, c’est tout ce que je sais.
Soupirant discrètement, Cordan se leva de sa
chaise, signifiant que l’interrogatoire était
terminé.
– Je vous remercie madame Corciano. Votre aide
nous a été précieuse. Je vous laisse mon numéro
de téléphone, dit-il en lui tendant une petite
carte. N’hésitez pas à m’appeler si quelque chose
vous revenez.
– Bien sûr inspecteur, répondit-elle simplement.
Suivant l’exemple de l’inspecteur, elle se leva à
son tour.
– Dîtes…
– Oui ?
– Quand est-ce que je pourrais récupérer le corps
de mon mari ? Pour les obsèques.
– D’ici un ou deux jours madame.
– Merci.
Puis elle sortit, sans un regard en arrière.
Cordan se rassit lourdement sur sa chaise. C’était
une sombre affaire, il le savait, il le sentait aux
creux de ses entrailles, mais il avait les mains
liées et devait se contenter des chemins
détournés pour avancer. Cela l’agaçait au plus
haut point ! Parfois, il hésitait à faire un petit
dossier aux médias et les laisser répandre la lie,
juste pour voir ce qu’il en sortirait.
*
Le lendemain, en début d’après-midi, un jeune
homme un peu craintif poussa la porte de
l’Orchidée. Son visage, marqué d’une cicatrice
sous l’œil gauche, exprimait une innocence telle
qu’elle en était déplacée dans un établissement
comme l’Orchidée. De courts cheveux blonds
vénitiens balayaient son visage d’ange et un
sourire candide faisait briller ses yeux verts et il
portait, sous son bras, un épais dossier.
Un autre jeune homme, assis au bar, l’observa
quelques instants et le voyant regarder à droite
et à gauche comme s’il cherchait quelqu’un, il se
décida à aller à sa rencontre.
– Je peux vous aider ?
L’autre se fendit d’un sourire reconnaissant et lui
tendit la main.
– Je suis Dimitry Warren et je souhaiterais voir
monsieur Chang.
– Samuel Stoneberg, répondit le jeune homme en
attrapant la main tendue qu’il serra brièvement.
Allez vous asseoir au bar, je le préviens que vous
êtes là.
Dimitry s’exécuta sous le regard méfiant de
Samuel qui leva le nez vers le plafond.
– Emi, y a un type qui veut voir Lee, il dit s’appeler
Dimitry Warren.
– Oui, répondit l’I.A., je préviens monsieur Chang.
Il y eut un bref moment de silence avant que la
voix désincarnée d’Emi résonne de nouveau
dans la salle de restaurant vide.
– Amenez-le, s’il vous plaît.
– Okay.
Samuel retourna au bar et enjoignit l’étranger à
le suivre. Ils montèrent à l’avant-dernier étage
où se situait le bureau du patron et avant que
Samuel n’ait pu frapper à la porte, elle s’ouvrit,
laissant le passage à un homme immense, à la
peau noire, qui dut se baisser pour ne pas se
cogner à l’encadrement. Le sourire presque
bestial qu’il affichait fit frissonner les deux
jeunes hommes dans le couloir, l’un de peur et
l’autre d’excitation. Le regard noir d’encre se
posa sur Dimitry.
– Le patron t’attend.
Puis il l’ignora superbement, ne se souciant que
de Samuel dont les yeux verts s’étaient illuminés
de désir. Il laissa le passage à Dimitry et vint
attraper l’autre jeune homme par les fesses qu’il
hissa dans ses bras sans aucune difficulté.
Oubliant qu’ils n’étaient pas seuls, ils
s’embrassèrent voracement, faisant rougir
jusqu’aux oreilles le pauvre Dimitry qui entra
précipitamment dans le bureau. Il ferma la porte
d’un coup sec et se retrouva devant deux paires
d’yeux qui n’avaient rien de plus chaleureux que
le regard glacial que l’homme qui venait de sortir
avait posé sur lui. L’un noir qui ressemblait
furieusement à ceux de Moira et l’autre, gris
acier, qui le glaça de peur.
– Heu… Bonjour, je suis Dimitry Warren. J’amène
le dossier sur Louis Farmand.
L’Asiatique s’avança vers lui et il résista à l’envie
de se tasser sur lui-même.
– Ah Dimitry ! Je suis Lee Chang.
Aussitôt, le jeune homme se détendit
sensiblement bien que certains de ses nerfs
étaient encore bien conscients de la présence
intimidante de l’autre homme. Pourtant, il se
tourna vers lui.
– Et vous devez être monsieur de Trincavel.
Lysandro se leva et fit le tour de son bureau.
– Et vous devez être le nouveau secrétaire de
Moira.
Le sourire qu’afficha Lysandro acheva de