– J’espère, Lysandro, que tu comptes manger avec nous ?
– Eh bien, eh bien… À condition que tu m’invites ! ! répondit Lysandro, agrémenté d’un clin d’œil.
Le rire de David s’éleva de nouveau dans la salle.
– Moi qui comptais m’en sortir avec une remise…!!!
Après un échange de quelques répliques narquoises, Lysandro accepta finalement l’invitation et les pria de commander un apéritif en l’attendant.
Il venait d’apercevoir, par la porte d’entrée ouverte, l’inspecteur Cordan descendre de sa voiture. Lysandro claqua des doigts sans quitter l’homme des yeux. Un jeune serveur arriva tout de suite à ses côtés.
– Oui monsieur ?
– Tu vois le vieil homme sur le trottoir devant ?
– Oui monsieur.
– Va me le chercher et amène-le au bar.
– Bien monsieur.
Le regard de Lysandro suivit le serveur jusqu’à ce qu’il sorte et passa au bar, fermé pour l’heure, où il s’installa. Il finissait de prévenir Lee, le prévenant de la présence de l’inspecteur dans les murs de l’Orchidée, que le serveur l’introduisait.
– Merci Karim. Retourne à ton poste.
– Oui monsieur.
Seuls, les deux hommes s’observèrent durant quelques secondes. Lysandro remarquait les traits marqués du vieil homme et espérait qu’il fut toujours aussi intègre que dans son souvenir tandis que le policier jaugeait de la dangerosité du plus jeune et s’il était de la même trempe que son père.
– Que me vaut l’honneur de votre visite monsieur l’inspecteur ?
– Votre petit cadeau de hier matin.
– Ah, sourit Lysandro, je me doutais bien que cela vous ferez plaisir.
– Je ne suis pas d’humeur pour vos plaisanteries monsieur de Trincavel. Je ne vous apprends certainement rien si je vous dis que l’évasion de Fred Corciano n’avait pas été signalé.
– Non, c’est exact. En tant que maître de guilde, j’aurais dû être mis au courant tout de suite s’il y avait eu une évasion à la Santé.
– Pouvez-vous donc m’expliquer pourquoi vous m’avez fait appeler plutôt que de faire appel directement à la Sécurité Intérieure ?
Le visage du maître de la Guilde du Divertissement devint sérieux.
– Parce que je ne leur fais pas confiance, c’est aussi simple que cela.
L’inspecteur soupira.
– Monsieur… Vous ne me faites pas confiance non plus. Je vous le redemande : pourquoi moi ?
Un sourire qui n’avait plus rien d’amusé fleurit sur le visage de Lysandro.
– Parce que vous êtes le seul à avoir essayé de faire tomber mon père et que vous êtes allé jusqu’à foutre en l’air votre carrière pour cela. Vous êtes intègre et, même si ma confiance en vous est limitée, je sais juger un homme. Vous êtes droit et ce meurtre, autant que je peux en juger, est le début d’une sale affaire. Et d’une sale affaire qui concerne le Lagon. J’ai besoin de quelqu’un à l’intérieur même de la Guilde de la Sécurité Intérieure pour savoir de quoi il en retourne vraiment.
La surprise, la fierté et la colère se disputaient dans l’esprit de l’inspecteur. Il se doutait bien que ce truand ne l’avait pas choisi au hasard, qu’il tenterait certainement de se servir de lui, mais il ignorait qu’il le tenait en si haute estime. Cela lui fit plaisir en un sens, sa hiérarchie lui ayant toujours reproché d’être trop rigide.
L’inspecteur soupira encore.
– Qu’attendez-vous de moi exactement ?
– Ah ! Décidément vous me plaisez ! Je tiens à ce que vous me teniez informer de votre enquête aussi souvent que possible.
– Vous savez que, même si mon commissariat est sur votre territoire, je ne dépends pas de vous. Je ne suis pas tenu à ce genre de chose et je risque gros si cela s’apprenait.