52
East meets West
L'Est rencontre
l'Ouest
« Le Pékin que j’aime est une ville en transition entre deux mondes, entre deux époques. Cet équilibre précaire est une forme d’état de grâce, qui est peut-être en train de disparaître», dit-elle. « J’aime ce mélange de tradition et de modernité, de mégalopole et de village chinois. Je pense que pour apprécier la vie en Chine, il faut avoir un certain sens de l’humour ou de l’absurde : on se trouve souvent dans des situations improbables, voir inconfortables. Mais en même temps il y a aussi quelque chose de léger, de décalé qui se dégage de cet endroit qui vit à plusieurs époques à la fois. Ces contrastes donnent à la ville un charme fou. »
Des contrastes qui existent aussi dans la peinture chinoise. « J’ai pris quelques cours de peinture traditionnelle et on y retrouve la même façon de penser que dans la médecine chinoise. Par exemple, le principe du yin/yang se retrouve dans les équilibres de la composition, entre zones vides et zones pleines, lignes épaisses et lignes fines, couleurs transparentes (rendu aquarellé) et couleurs opaques (rendu gouache). La première chose que mon professeur commentait quand elle voyait mon travail, c’était mon état d’esprit en peignant, s’il y avait de la concentration et de la sérénité, ce que l’on ressentait au-delà de ce qui était représenté. »
De Chine, Sylvie Guérard a ramené le matériel qu’elle utilise pour dessiner : encre de Chine, pinceaux en bambou et poil de chèvre, petit bol pour diluer l’encre en pierre du Yunnan, papier de riz et barres de bois engravées pour le tenir à plat. « Travailler sur ordinateur ou sur les machines bruyantes de la sérigraphie n’est pas du tout pareil que de travailler avec le matériel de peinture chinoise. Dessiner avec ces outils, c’est comme faire du yoga : leur beauté, leur finesse contribuent à me centrer. Il y a quelque chose d’immuable dans ces matériaux et les gestes qui les accompagnent. Par exemple, il y a un geste de la main que j’aime beaucoup, lorsque le vendeur compte les feuilles de papier au magasin, il les met en éventail avec un geste très élégant. Je pense que ça doit faire mille ans qu’ils ouvrent le papier comme ça, c’est magnifique à voir. » Elle a aussi fait sculpter un sceau de pierre au prénom chinois que son maître de médecine chinoise lui a donné.
“The Beijing that I love is a city in transition between two worlds, between two eras. This delicate balance is a kind of state of grace that is perhaps in the process of disappearing,” she says. “I love this mix of tradition and modernity, of megalopolis and Chinese village. I find that in order to appreciate life in China, one has to have a certain sense of humor or a sense of the absurd. People often find themselves in unlikely situations, even uncomfortable ones at times. But at the same time, there is also something that is light and unconventional that comes from a city that lives in several eras at the same time. These contrasts give Beijing a great charm.”
These contrasts can also be found in Chinese painting. “I took some traditional Chinese painting classes in Beijing and you will find the same way of thinking as in Chinese medicine. For example, the principal of yin and yang is found in the balance between empty spaces and filled areas of a composition, thick lines and fine lines, or transparent colors (from using pigments that look like watercolor) and opaque colors (from using pigments that look like gouache). The first thing that the teacher commented on when she saw my work was my state of mind when I painted, if focus and tranquility were present and what was felt beyond the image depicted.”
Sylvie brought back from China the material she used for her drawings: ink from China, bamboo and goat hair paintbrushes, a small bowl made of Yunnan stone to dilute the ink, rice paper and engraved wooden paperweights. “Working on a computer or on noisy silkscreen printing machines is very different from working with Chinese painting materials. Drawing with these tools is like doing yoga: their beauty and their fineness help me to stay centered. There is something timeless about these materials and the gestures that accompany them. For example, there is a movement of the hand that I love very much: when the salesman counts the sheets of paper in the store and spreads them out in the shape of a fan with a very elegant gesture. I think that it must be since 1000 years that they present the paper like that, and it is magnificent to watch.” She also had a stone seal made with her Chinese name that her mentor in Chinese medicine had given her.
Art & Inspiration
Sylvie Guérard's drawing materials from China.
Les matériels de dessin chinois de Sylvie Guérard.
© Sylvie Guérard
"There is also something that is light and unconventional
that comes from a city that lives in several eras at the same time.
These contrasts give Beijing a great charm.”
.« ll y a aussi quelque chose de léger, de décalé
qui se dégage de cet endroit qui vit à plusieurs époques à la fois.
Ces contrastes donnent à la ville un charme fou. »
- Sylvie Guérard