Acte de colloque : La pierre, un choix sociétal | Page 97

Compétences
Mme Bagnéris .
Non , il n ’ y avait pas de contraintes sismiques dans ce projet .
M . D ’ Elia .
Je voulais faire un complément à la première question .
Sur le dimensionnement , il y a quand même des limites d ’ élancement dans le DTU . Sur un mur de moins de 30 centimètres , on ne peut pas faire plus de 3 fois la hauteur en longueur . Si le mur fait plus de 30 centimètres , on peut faire jusqu ’ à 5 fois en élancement . C ’ est le DTU . Après , il y a aussi le gisement de la carrière . Là , en carrière , ce sont des bancs de 80 environ . On fait donc 2 assises de 35 centimètres pour passer dans le banc . En longueur , les blocs marchands faisaient 1,80 mètre par 1,50 mètre . Quand je découpe mes longueurs , je prends en compte le bloc pour faire le moins de perte possible . vous concevez en pierre , cette compétence de l ’ appareilleur-tailleur de pierre . Sinon , vous passez à côté de 2 000 ans d ’ histoire . ( Applaudissements .)
M . D ’ Elia .
L ’ architecte et l ’ appareilleur ne sont pas en opposition , très loin de là . L ’ architecte , c ’ est un autre métier . Moi , je ne sais pas concevoir des espaces , je ne sais pas comment entre la lumière , etc . Je ne connais pas les philosophies des projets et je suis très mauvais pour vendre telle forme ou telle forme . Les architectes savent très bien le faire . Ils parlent avec d ’ autres métiers . Ils doivent connaître un peu de tout sur tout . Moi , je connais la pierre : comment la découper , comment la poser et comment la tailler . C ’ est déjà pas mal .
( Applaudissements .)
40 % du chantier , ce sont des modules . Ils sont noyés dans toute la masse et vous ne les distinguez pas trop . Après , il y a de l ’ asymétrie . Il est difficile d ’ avoir un caillou qui se répète tout le temps , mais on a fait au mieux pour ne pas avoir trop de pertes .
Mme Bagnéris .
Pour rebondir sur ce point , et vous venez d ’ en faire la belle démonstration par cet échange : dans la régénération de la pierre comme matériau à bâtir , en France , on doit à Perraudin d ’ avoir réinsufflé ce matériau , mais on a créé une sorte de mythe de la relation architecte-carrier pour bâtir .
L ’ intérêt de cette journée est de montrer comment cette collaboration évolue aujourd ’ hui , et , il me semble , plus judicieusement par rapport aux nombreuses exigences auxquelles il faut répondre quand on bâtit . C ’ est non plus le carrier , qui n ’ a jamais été un bâtisseur — c ’ est quelqu ’ un qui sait identifier dans le paysage une matière qui peut devenir apte à bâtir … Il existe des métiers qui ont encore ce savoir pour faire le lien entre la carrière et l ’ architecte : c ’ est le métier d ’ appareilleur-tailleur de pierre .
Perraudin , dans son manifeste , dit clairement que le calepin est l ’ apanage de l ’ architecte . Je ne suis qu ’ une piètre ingénieure , mais c ’ est faux . Il y a des contraintes techniques et des contraintes économiques . Je veux bien qu ’ un architecte fasse le calepin , mais qu ’ il fasse les 20 ans d ’ études d ’ un appareilleur pour comprendre les enjeux du calepin .
Les interventions de ce matin ont montré , par le vocabulaire employé , la méconnaissance de votre métier . Il faut vraiment réintégrer , quand
Un intervenant .
Bonjour . En regardant la coupe , on voit que l ’ on réduit au minimum les quantités de béton un peu partout . C ’ est très intéressant . Mais cela met en exergue les endroits où il y en a plein : les fondations . Y a-t-il des possibilités pour changer cela , et rajouter de la pierre aux fondations ? Comment pourrait-on le faire ?
Mme Bagnéris .
Oui , il y a bien sûr des solutions . Pas systématiquement , car cela va dépendre du sol . On essaie , quand on peut , de faire les fondations également en pierre , ou en béton cyclopéen , à partir de grosses masses rocheuses , avec un liant chaux hydraulique .
On a eu la chance de faire cela sur un projet . On le met en œuvre sur des fondations en granit sur un autre projet . C ’ est tout à fait possible , mais il ne faut pas faire n ’ importe quoi . Quand c ’ est possible , pourquoi pas . Grégoire le disait tout à l ’ heure : nous avons des pierres qui peuvent être de la qualité d ’ un piètre béton , mais aussi de la qualité d ’ un béton haute performance . Il y a des choses possibles . Dans n ’ importe quel rapport géotechnique , quand il y a de l ’ existant pas loin et qu ’ une fouille est faite , le géotechnicien ne décrit jamais une fondation béton ; il décrit une fondation de pierre , sur un bâtiment existant depuis plusieurs décennies .
C ’ est possible , quand c ’ est judicieux .
M . Aubertin .
En complément , j ’ ai eu l ’ expérience d ’ une petite maison en bois que l ’ on a fondée sur des blocs
97 COLLOQUE - LA PIERRE , UN CHOIX SOCIÉTAL