WAVE RADIO MAG 2024 | Page 60

ENVIRONNEMENT / Landes
Le président de Macs a signé la préface du livre d ’ Édouard Dequeker et Guillaume Baudoin : « Écrit par un économiste et un cadre technique , c ’ est un ouvrage intéressant , une base de travail . Il manque un éclairage politique de l ’ aménagement du territoire , et je ne partage pas toutes les solutions présentées . Comme à propos de la gouvernance de la communauté de communes . » Si Pierre Pecastaings reconnaît nécessaire ce transfert de compétence à l ’ intercommunalité , il n ’ est pas pour le changement de mode de scrutin : « J ’ ai peur d ’ une perte de lien direct avec les administrés . Il faut vraiment coordonner 2 objectifs : élargir les enjeux et conserver une proximité . »
D ’ autres freins pourraient compliquer la sobriété foncière . « Beaucoup pensent que développer égale artificialiser , regrette Édouard Dequeker . On a tendance à esquiver le débat par des oppositions binaires , comme croissance et décroissance . Or , il existe 3 leviers : l ’ innovation , l ’ optimisation – à niveau de vie constant , on est plus efficace dans la gestion des ressources –, et le renoncement , la décroissance . Je ne connais aucun scénario prospectif qui fasse l ’ impasse sur l ’ un de ces leviers . La question est de savoir où on va les placer . »
Repenser le logement
Cette nécessité de moins construire se heurte aussi à la crise du logement . Certains craignent que la rareté des terrains entraîne une augmentation des prix . « Le Zan commence à peine à être une contrainte , répond le professeur d ’ économie . Or , l ’ augmentation des prix est la réalité des 15-20 dernières années . On n ’ a jamais autant construit que dans la décennie 2010 avec des taux d ’ intérêt bas et les prix n ’ ont cessé d ’ augmenter . De 250 à 300 %. L ’ inflation est notre réalité mais n ’ est pas imputable au Zan . »
La crise du logement concerne aussi les locataires : les locations saisonnières en nombre diminuent les offres de logements à l ’ année , le manque de logements sociaux … « La politique du logement est à bout de souffle aujourd ’ hui , analyse Édouard Dequeker . La sobriété foncière et les questions environnementales , parce qu ’ elles sont transversales , peuvent être l ’ occasion de remettre à plat toute une politique et faire autrement . Il existe des outils pour réguler les prix du logement , notamment le BRS 3 . Ce qui me semble impératif , c ’ est la question de l ’ encadrement des prix . Aujourd ’ hui , c ’ est un outil de production de dynamique patrimoniale privé , de spéculation . Or , c ’ est une denrée limitée , un bien commun comme l ’ eau . Il faut trouver des outils pour en sortir . Si la collectivité reste maîtresse du foncier , vous contribuez à ce que les logements soient plus abordables . Le curseur de l ’ artificialisation doit être orienté massivement vers des logements abordables . On prône un plancher à 50 %, je dirai même 70 % car la fracture entre le marché du logement et du travail est devenue extrême sur ce territoire comme au Pays basque . »
LANDES ATLANTIQUE SUD À L ’ ÉPREUVE DE LA SOBRIÉTÉ CROÎTRE SANS S ’ ÉTENDRE
ÉDOUARD DEQUEKER ET GUILLAUME BAUDOIN Éd . de l ’ Aube et de l ’ Essec Octobre 2023
Plan d ’ action local
Macs œuvre dans ce sens avec un « plan Marshall du logement . Nous travaillons avec les élus pour une mise en route concrète rapide . Que le nombre de logements à l ’ année soit au même niveau que les logements saisonniers . Modifier le PLU pour mettre un ratio de logements sociaux dans les projets de construction et d ’ aménagement . Nous avons aussi augmenté en 2024 notre participation auprès des bailleurs sociaux . Développer l ’ offre de logements abordables qui échappent à la spéculation . Mais pour l ' éviter , il faut maîtriser le foncier . Il faut acquérir et donc , avoir des fonds , des partenaires . On doit consommer moins , voire pas du tout , mais aussi répondre à la demande des habitants pour qu ’ ils puissent se loger . Il faut trouver un nouvel équilibre . » Sans oublier l ’ État qui a aussi son rôle à jouer : « Le législateur doit aligner le Zan avec une refonte de la fiscalité pour inciter à la transaction plutôt qu ’ à la rétention », préconise Édouard Dequeker .
Nouveaux calculs
La rénovation de l ’ existant apparaît logique mais coûte plus cher que le neuf : « Le surcoût est l ’ ordre de 20 à 25 %, confirme Édouard Dequeker , mais lorsque l ’ on émiette la ville , il y a aussi des surcoûts : tirer des réseaux d ’ eau , numériques , de la voirie ... On ne sait pas les chiffrer précisément car ils sont éclatés sur différents budgets . Je suis persuadé que cela revient plus cher pour la collectivité . Simplement ce n ’ est pas la même personne qui paye . Des études sont en cours . Ce serait un éclairage , une aide à la décision . Dans certains pays , ces surcoûts sont partagés entre la puissance publique et les promoteurs . »
L ’ autre moyen de moins consommer est de changer les modèles de l ’ habitat , comme le relève Pierre Pecastaings : « Une concertation avec la population est nécessaire pour qu ’ elle saisisse les enjeux et les conséquences . Il faut réfléchir à autre chose que le modèle du lotissement . » Même constat à Hossegor : « On n ’ est plus dans une logique de grands espaces . Il faut revoir les espaces et les fonctionnalités . Un projet d ’ écoquartier dans ce sens est à l ’ étude sur notre commune . »
Un changement de mentalité s ’ opère . Une mutation angoissante pour certains , impossible pour d ’ autres mais pourtant nécessaire . « Tout n ’ est pas dans la loi , on va devoir naviguer à vue , reconnaît Édouard Dequeker . Son grand mérite : elle n ’ a pas esquivé la contrainte . Et il s ’ est passé quelque chose depuis un an et demi . Il y a eu beaucoup de contributions à ce sujet . Cela nous force à penser autrement . »
1 . La consommation d ’ espaces : création ou extension effective d ’ espaces urbanisés sur le territoire concerné ». C ’ est-à-dire la conversion d ’ espaces naturels , agricoles ou forestiers en espaces urbanisés . ( Art . 194 de la loi Climat et Résilience )
2 . L ’ artificialisation : « altération durable de tout ou partie des fonctions écologiques d ’ un sol , en particulier de ses fonctions biologiques , hydriques et climatiques , ainsi que de son potentiel agronomique par son occupation ou son usage ». ( Art . 192 de la loi Climat et Résilience )
3 . Bail réel et solidaire : bail longue durée qui distingue le bâti du foncier
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