talents
MODE
TEXTE _Elsa GALLAND
Numa FIGUCCIA
mode unisexe intemporelle
J
’aime l’omniprésence du lin et du coton dans les intérieurs traditionnels. C’est
pour cela que je suis revenu », explique-t-il, la voix claire et douce. À contre-
courant de la vision colorée que l’on se fait souvent du costume provençal d’autre-
fois, avec ses indiennes imprimées, et tout aussi éloigné de leur réinterprétation
baroque par l’Arlésien Christian Lacroix, les pièces de Numa Figuccia pro-
posent une transcription de la lumière intense et blanche du Sud. Sa Provence à
lui possède des lignes franches dont la pureté solaire habite longtemps la rétine. «
Je propose un vestiaire assez minimaliste, intemporel. Unisexe mais plutôt mas-
culin et en quelque sorte hors saison », explique-t-il. Un vestiaire unisexe dont
les femmes se sont emparées avec plaisir lorsque sa toute première collection a
été proposée en 2018 chez BO La Suite, à Aix. Un premier succès qui a conduit
le jeune styliste à envisager des pièces et des matières plus féminines pour l’été
2019 : « Un organza flottant qui dessine une allure féminine vaporeuse. Beaucoup
de toiles de coton, des plissés, des lignes géométriques toujours. Du polyester
gaufré, une matière technique très innovante », commente le créateur, avant d’ajouter : « Mes vêtements
traduisent un certain style de vie. La question de l’élégance, de la légèreté est centrale. Celles qui portent
mes vêtements aiment sans doute les belles choses. J’ai baigné très tôt dans une famille entourée de femmes
qui aimaient s’habiller. Cela a beaucoup déterminé mes choix ultérieurs. »
Il aurait pu rester à Paris, là où, dit-on, se fait la mode. Là où, durant trois années,
il a appris les métiers de styliste et de modéliste. Mais c’était compter sans sa
puissante envie d’exprimer « un certain art de vivre dans le Sud de la France ».
Numa Figuccia revient pour ToutMa sur son parcours, ses influences, sa vision de
la femme et affirme son attachement à la Provence, une terre qui l’a vu naître avant
de devenir sa muse.
U
ustine Bodin, elle aussi styliste et qui travaille en collaboration avec
Numa, développe l’articulation de la future collection : « Certaines par-
ties du corps sont camouflées tandis que l’on choisit de mettre en valeur
un poignet ou les chevilles. La silhouette est pudique mais reste
féminine et séduisante. » Entre Justine et Numa règne une tou-
chante complicité, sans doute acquise durant les trois années qu’ils
ont passées ensemble à l’école Mod’Art International, à Paris, où
un solide enseignement technique leur a été dispensé. « Il était
important pour moi d’avoir cette double formation. De savoir
réaliser des vêtements et pas uniquement les dessiner », insiste
Numa. Ses passages chez Atelier Bartavelle d’abord, puis auprès
de la créatrice Christine Phung, lui ont permis d’approfondir
sa maîtrise de la chaîne du vêtement depuis sa création jusqu’à sa
présentation au moment du défilé et d’affûter son style.
J
E
n juin prochain, la nouvelle collection Numa Figuccia, sur laquelle travaillent également les deux
jeunes créateurs, sera dévoilée au public à l’occasion d’un défilé dont le lieu est encore tenu secret...
Affaire à suivre !
_www.numafiguccia.fr
Avril / Mai 2019 _TM n°54
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n style profondément marqué par l’œuvre de Soulages, maître de la peinture informelle, dont Numa
indique apprécier la puissance des contrastes, dus à la technique employée pour élaborer l’outrenoir.
Une matière dont la surface réfléchit intensément la lumière, sans concession, comme les lignes de la col-
lection professionnelle que Numa Figuccia et Justine Bodin élaborent actuellement pour le restaurant gas-
tronomique du futur hôtel cinq étoiles du château de la Gaude, au nord d’Aix-en-Provence. Pour celui qui
confie avoir également un vif intérêt pour l’architecture contemporaine, « le vêtement doit s’enfiler de
façon simple. Le mouvement est important. Il faut savoir comment le vêtement va bouger. C’est assez éloi-
gné d’une élégance traditionnelle ». Le Japon sera au centre de la cuisine du château, ainsi en est-il pour les
vêtements imaginés par Numa et Justine : des hauts d’une seule pièce à l’esprit kimono, des tuniques aux
fermetures latérales rappelant, elles aussi, le obi du vêtement traditionnel nippon. Difficile dès lors de ne pas
prêter à Numa Figuccia les mots d’Yves Saint Laurent : « Quand on se sent bien dans un vêtement, tout
peut arriver. Un bon vêtement, c’est un passeport pour le bonheur. »