La première opération humanitaire d’importance menée par l’Union a lieu à la suite des massacres de Cilicie, qui commencent le 13 avril 1909 et engendrent quelque 25 000 morts, des milliers de blessés et une foule de sans-abris. Vivant dans des conditions précaires, sous des tentes, à la périphérie de villes comme Adana, il fallait assurer à ces sinistrés des soins médicaux, une aide alimentaire et la prise en charge des nombreux orphelins. Si le Patriarcat arménien de Constantinople assura la gestion politique de cette affaire, envoya sur place une mission médicale efficace et prit en charge l’organisation d’orphelinats, l’Union prouva à tous, en cette occasion, l’efficacité de son action en secourant les survivants avec une grande rapidité et en accueillant même provisoirement en Égypte une partie des victimes. Très tôt, les 10 000 Arméniens réfugiés à Dörtyol, au fond du golfe d’Alexandrette, adressèrent à l’Union un message pour que celle-ci assure le ravitaillement en farine de ces villageois encerclés par des irréguliers, dont les réserves alimentaires étaient sur le point de s’épuiser. Devant l’urgence de la situation, Boghos Nubar et Yervant Agathon se rendirent immédiatement auprès du chargé d’Affaires italien au Caire, afin de le convaincre de télégraphier à M. Cartoni, le vice-consul italien d’Alexandrette, ville située à deux heures de Dörtyol, pour que le diplomate italien amène en personne un chargement de farine aux assiégés. Quarante-huit heures plus tard, M. Cartoni livrait la marchandise payée par l’Union par voie télégraphique23.
Bien évidemment, l’action de l’Union en Cilicie ne se limita à cette seule opération. Il faut en effet rappeler que les massacres ont été suivis de pillages et de destructions qui laissèrent les survivants dans une situation socio-économique rien moins que catastrophique : on compte alors 90 000 sans abri, 7 903 orphelins et 4 823 maisons, fermes, écoles, églises, boutiques et échoppes détruites24.
Adana et Dörtyol en avril 1909 : un tournant dans l’histoire de l’Union
Orphelinat Kélékian de l’’Union, à Dörtyol, en 1913 (coll. Archives Bibl. Nubar de l’UGAB/ Paris).