chez eux le jeune Aubrey et sa soeur Mabel 1 . Cet évènement
demeura cependant anecdotique et leurs liens restèrent inexistants
jusqu’en février 1892, date à laquelle leur ami commun Robert
Ross, les présenta de nouveau l’un à l’autre. Un incertitude reste
attachée à la date de leurs retrouvailles, mais elles ne se situent
certainement pas au-delà d’avril 1893. À ce moment-là, Wilde a
déjà publié « Salomé » en français, et il cherche un illustrateur pour
la version anglaise, qui a été confiée à son jeune amant Lord Alfred
Douglas. Wilde a vu, dans le premier numéro de ‘The Studio’ le
dessin de Beardsley : « J’ai baisé ta bouche, Iokanaan » et
impressionné, il lui envoie la version française de « Salomé » avec la
dédicace suivante ; « For Aubrey : for the only artist who knows
what the dance of seven veils is, and can see that invisible dance.
Oscar. » ("Pour Aubrey: pour le seul artiste qui sait ce qu'est la danse
des sept voiles, et qui peut voir cette danse invisible. Oscar"). À ce
moment-là, Wilde a trente-huit ans et Beardsley, vingt et un. C’est
un jeune-homme étrange, solitaire, longiligne, probablement à
tendance homosesexuelle, auquel on ne connait pas de liaison
amoureuse, même si certains le soupçonnent, sans aucune preuve,
d’entretenir une relation incestueuse avec sa soeur Mabel. Sans
doute avait-il une sexualité assez faible. « Ne vous asseyez pas sur
la même chaise qu’Aubrey, dit un jour Wilde. Il n’est pas assez
copromettant ». En réalité, il appartient tout entier à son art.
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Richard Ellmann – Oscar Wilde – Gallimard, 1994, pour la traduction française – p.339
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