Ritual, Secrecy, and Civil Society Volume 8, Number 1, Spring 2021 | Page 18

Ritual , Secrecy , and Civil Society
légende du Royal Arch 6 . Ils ont identifié une source chrétienne dont les premières attestations remontent aussi à l ’ Antiquité . Un auteur grec , Philostorge , rapporte en effet une histoire de voûte cachée sous le Temple . Philostorge ( vers 370 - vers 430 ) est l ’ auteur d ’ une Histoire Ecclésiastique en douze livres … qui ne nous est connue que par un abrégé réalisé par le savant patriarche byzantin Photios ( vers 820-890 ). Bien qu ’ elle soit l ’ œuvre d ’ un « hérétique » – Philostorge était « arien » – cette Histoire Ecclésiastique a été assez utilisée car elle relate de nombreux épisodes de l ’ histoire ancienne du christianisme . L ’ abrégé de Photios fit l ’ objet d ’ une traduction en français publiée par « le président Cousin » en 1676 . On y retrouve effectivement l ’ épisode de la « Voûte » cachée et secrète . Désirant faire mentir la prophétie de Jésus comme quoi le temps du Temple était révolu ( Mt 24.2 ), l ’ Empereur Julien ( 355-363 ) voulut le reconstruire . Lors de premiers travaux dans les fondations , le déplacement d ’ une pierre laissa apparaître l ’ entrée d ’ une grotte creusée dans la roche . Un ouvrier s ’ y glisse et découvre à tâtons un piédestal sur lequel repose un rouleau . Lorsqu ’ il le remonte à la surface on y découvre le premier verset du prologue de l ’ Évangile de Jean . Bien naturellement en contexte chrétien , la découverte ne touche donc plus l ’ Arche d ’ Alliance , mais le livre de la nouvelle alliance . Notons que c ’ est là exactement la « légende de la Voûte » dans la tradition irlandaise du Royal Arch . Là encore , siècle après siècle , la tradition se maintient dans certains cénacles et chez les religieux érudits . En milieu protestant d ’ abord où l ’ on découvre une importante citation de la légende dans le Orbis Miraculum , or the Temple of Solomon , de Samuel Lee ( Londres , 1659 ). Puis en contexte catholique avec la célèbre Histoire ecclésiastique de l ’ abbé Fleury qui lui consacre trois pages ( 1724 , T . 4 , p . 89-91 ). Ouvrage qui connut un grand succès et qui était présent dans toutes les bonnes bibliothèques en France au xviii e siècle . Souvent la légende de Philostorge est complétée par des éléments tirés d ’ un autre auteur antique , Ammien Marcellin ( Ammianus Marcellinus ), un contemporain de Julien , païen convaincu et hostile au christianisme . Il explique que lors de cette tentative avortée de reconstruction du Temple de Salomon , les ouvriers furent aussi empêchés de poursuivre leur travail par l ’ apparition de boules de feu qui sortaient des fondations et rendaient le lieu inaccessible ( voir : Ammien Marcellin ou Les dixhuit livres de son Histoire , L . xxiii , Chap 1 , T . 1 p . 225 et Fleury , p . 91 ). Dans un contexte biblique « le feu [ est ] signe de la présence et de l ’ action divines » 7 . Le travail dans les fondations du Temple provoque donc une théophanie .
6 Pour une présentation synthétique des sources de la légende du Royal Arch identifiées par les historiens maçonniques anglais , on pourra se référer à deux classiques : Bernard E . Jones sur l ’ Arc Royal : Freemason ’ s book of the Royal Arch , George G . Harrap & Co , London , 1957 , pp . 126-130 ; et Harry Carr , Harry Carr ’ s World of freemasonry , the collected papers and talks of Harry Carr , Lewis Masonic , London , 1983 , pp . 172-174 et p . 359 .
7 Collectif , Dictionnaire de spiritualité ascétique et mystique …, Beauchesne , Paris , 1964 , article « Feu », t . V , p . 247 .
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