CULTURE
Kenojuak Ashevak Curious Intruder, 2009 Eau-forte et aquatinte
50,5 x 50 cm
Kenojuak a été présentée au monde pour la première fois en 1963 par le biais de la production de l’ Office national du film du Canada, intitulée Eskimo Artist: Kenojuak. Mis en nomination pour un Oscar, ce remarquable documentaire capturait les débuts et les jours prometteurs de la Coopérative des arts ainsi que la vie enrichissante et l’ art enchanteur de cette merveilleuse jeune femme. À cette époque, l’ Arctique canadien était un mystérieux endroit aux confins du monde, seulement connu pour son climat inhospitalier et ses Esquimaux qui parvenaient d’ une manière ou d’ une autre à y survivre. Ce film a ouvert les yeux du monde extérieur et, à mesure que chaque collection annuelle de gravures sortait « dans le sud », le nom de Kenojuak devenait synonyme des mystères, de la générosité et des beautés du Grand Nord canadien.
Lorsqu’ on lui demandait de parler de ses motivations en tant qu’ artiste, Kenojuak disait souvent que « faire quelque chose de beau » lui servait d’ inspiration pour son travail, ce qui comprenait ses décisions artistiques quant à ses thèmes, son choix de couleurs et ses compositions. Pour Kenojuak, le choix du thème constituait un moyen de parvenir à une fin. Contrairement à plusieurs de ses contemporains, elle n’ était pas une conteuse ou une narratrice. Elle se préoccupait toujours de l’ image en elle-même et le thème était souvent décidé durant le processus d’ élaboration de la gravure.
Vu qu’ elle était gauchère, elle commençait par dessiner dans le coin supérieur gauche de la page pour lentement s’ en éloigner et remplir la page de combinaisons fantastiques d’ oiseaux, d’ animaux et de personnages. Comme elle le disait: « Je peux commencer dans un coin une forme sans savoir ce qu’ elle deviendra; je dessine simplement en pensant, je pense en dessinant. J’ essaie de reproduire des choses qui satisfont mes yeux, qui me plaisent. »
Son « œil » était extraordinaire, surtout pour une artiste visuelle n’ ayant suivi aucune formation officielle. Elle était hésitante au début, mais elle a très rapidement développé ses lignes assurées et fluides et son sens aigu du design si évidents tout au long de sa carrière. Avant qu’ on lui offre du papier et des crayons, elle ne possédait que très peu de moyens d’ exprimer sa créativité, mais elle a travaillé avec ce qu’ elle avait. Comme la plupart des femmes inuites de sa génération, elle était douée en couture et elle a travaillé avec de la peau de phoque et du cuir de caribou pour créer des motifs d’ appliqués. L’ un de ces motifs a été à la base de sa première, et maintenant sa plus célèbre image, Rabbit Eating Seaweed. Elle provenait d’ un motif d’ appliqué, fait de peau de phoque, qu’ elle avait créé sur un sac à main.
Une fois que Kenojuak a eu à sa disposition du matériel de dessin, elle n’ a jamais regardé en arrière. À mesure que de nouveaux matériaux faisaient leur apparition, elle est passée du crayon de plomb aux crayons de couleur et aux plumes à pointe en fibre à l’ acrylique. Elle choisissait des combinaisons de couleurs primaires vives et agréables et ornait ses thèmes préférés— surtout le hibou et le corbeau— d’ un plumage exagéré, remplissant la page d’ une explosion de couleurs.
22 revue six étoiles