Revue Six Étoiles Revue Six Étoiles automne 2017 | Page 17
Mon excursion d’aujourd’hui consiste en une virée à fond les gaz
à l’extérieur de Victoria, sur la Transcanadienne en direction de
Duncan. Après environ une heure de route, je remarque un panneau
pour la sortie du Sommet Malahat, mais les gens du coin savent
que la deuxième sortie est mieux. Après un égoportrait de mise, je
suis de retour dans ma voiture pour voir défiler le lac Shawnigan et
atteindre l’une des structures de chemin de fer sur pont à chevalets
en bois les plus spectaculaires au monde, soit Kinsol Tressle.
S’étendant sur 187 mètres de long et d’une hauteur de 44 mètres
au-dessus de la rivière Koksilah, une rivière à saumons, le pont
entièrement construit en pin Douglas me permet de me dégourdir les
jambes et de titiller mes sens en leur offrant un panorama incroyable.
À nouveau la faim au ventre, je conduis quelques minutes pour
m’arrêter à la cidrerie et distillerie Merridale, l’endroit parfait pour
reprendre des forces grâce à leur pizza cuite au four à bois et faire
provision de plusieurs bouteilles de cidre naturel, non pasteurisé.
En regardant de plus près les terrains, j’y trouve des yourtes de
glamping, des traces de pavillons de jardin abondamment décorés
d’ornements de mariage de tout genre et un camion de cidre qui, si
je le réquisitionnais, me rendrait célèbre avec la foule de Tofino (ou,
en fait, de partout ailleurs).
Port Alberni à Tofino est un trajet de rêve pour tout puriste de la
conduite automobile. Pour me préparer au divin crescendo de ma
virée en voiture, un arrêt s’impose au Marché du comté de Coombs
pour y déguster une crème glacée et observer les chèvres broutant
de l’herbe. Dans les années 1950, les émigrés norvégiens, Kristian
et Solvieg Graaten ont développé le marché en bâtissant à flanc de
coteau une ferme et un marché typique de leur patrie, avec les toits
recouverts de gazon. Cette décision a peut-être contribué à faire en
sorte que le Marché du comté de Coombs devienne le bâtiment à toit
de gazon le plus célèbre au monde. Vous avez déjà vu des chèvres
et vous avez déjà vu des toits, mais avez-vous déjà vu des chèvres
brouter sur des toits?
Happé par un flot de souvenirs des excursions de mon enfance, je
fais un dernier arrêt à Cathedral Grove, aussi connu sous le nom de
Parc provincial MacMillan. Les pins Douglas et les cèdres massifs
vieux de 500 ans me donnent l’impression qu’à tout moment l’un
des premiers Ents, Barbebois, du Seigneur des anneaux surgira pour
m’offrir quelques conseils pleins de sagesse, du style « Assure-toi de
faire le plein avant de prendre la route de Port Alberni à Tofino ».
(Un conseil des plus judicieux, car c’est un trajet de 90 kilomètres.)
Je perds la notion du temps en me promenant par monts et par vaux
vers l’océan Pacifique. Lorsque j’arrive à Ucluelet et que je tourne à
droite vers Tofino, je suis venu à bout de satisfaire mon envie de battre le
bitume. Je m’arrête à la station balnéaire de la marina de Tofino qui vient
tout juste d’être rénovée pour un repas bien mérité au 1909 Kitchen. Le
serveur me sert une pinte de Philips Blue Buck que je combine à une
morue-lingue côtière parfaitement grillée.
Le repas est excellent, mais n’arrive assurément pas à la cheville
de l’incroyable vue que m’offre le port de Tofino. Le soleil plonge
lentement à l’horizon, laissant place à la lune. Au petit matin, tout
ce qui me reste à cocher sur ma liste de choses à faire à l’île de
Vancouver est de me tremper les orteils dans l’océan à Long Beach
et de prendre le chemin de la maison.
revue six étoiles 15