ReMed 2018 Remed 5 - Histoire de la Médecine | Page 46
Littéra’Tour
L’Etoile Gravée
Nabil GUERBOUKHA
L’auteur empreinte les yeux du jeune garçon « Malek » pour décrire le vécu d’une famille algérienne au
temps de la guerre d’Algérie, dans un des villages des hautes montagnes de Kabylie nommé El-Meyen.
Malek a 5 ans, vit avec ses parents et ses grands-parents. L’écrivain -représenté par le petit Malek- nous
rapporte des souvenirs de sa petite enfance ; des images, des paroles et des scènes, tristes ou joyeuses,
illustrant les traditions de la région. L’armée française arrive et jette ce petit monde villageois dans la
guerre et la mort.
Malek et son village natal
L
a famille de Malek vivait au sein du village, grands-
parents, parents, oncles, tantes et cousins occu-
paient tous la même demeure, où le patriarche
Ahmed, était le maître des décisions.
Au matin d’une journée de fin Aout 1956, à El-Meyen,
c’est le début de la saison des figues, Malek et les
autres enfants du village sont impatients de goûter à
ce délicieux fruit de la région. Depuis plusieurs jours,
ils ont respecté l’interdiction ancestrale de les cueil-
lir quatorze jours après l’annonce de l’apparition de la
1ère figue mûre. Ce jour-là, toute la famille était réu-
nie, y compris Athmane, le père de Malek, de retour de
France. L’argent qu’il gagnait à l’étranger était partagé
entre nourrir la grande famille et cotiser au front de
libération.
Dans le chemin du retour de la figueraie, ils
voyaient de loin leur village, El-Meyen, qui paraissait
comme un conglomérat de maisonnettes, aux toits
rouges très colorés, dressées au sommet d’une crête,
à mille mètres d’altitude ; « D’où que tu viennes à El-
Meyen, une montée t’accueillera. » Le minaret de la
mosquée centrale du village occupe le point le plus
élevé, duquel émettaient les appels sacrés à la prière,
amplifiés par l’écho des montagnes avoisinantes, qui
se dressent tout autour des vergers, des carrés de lé-
gumes et des petites parcelles de céréales tapissant le
paysage. Ahmed montra de loin, et avec fierté, à Malek
l’école du village. Une école française dans laquelle il
ira prochainement acquérir du savoir, et précise que
lui-même était acteur de son agrandissement une
trentaine d’années auparavant.
Promenades avec les grands-parents
Par ailleurs, Malek s’amusait souvent avec ses cousins
et son petit frère à de multiples jeux appris la pre-
mière fois des adultes. Il avait aussi le privilège d’ac-
compagner ses grands-parents dans leurs sorties au
village.
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Printemps 2018
Parfois, il partait avec son grand-père à Thizi,
la placette du village. Entre adultes, les discussions
tournaient généralement autour de la guerre, une
fois seuls, Ahmed en profitait pour donner au garçon
des leçons de vie et de morale pour l’initier à une
vie d’Homme ; il lui parlait souvent de l’importance
qu’accordait la famille au blé, aux oliviers, aux figuiers
et à l’huile d’olive « il les semait sciemment dans l’âme
verte du garçon pour mieux le propulser dans l’avenir ».
D’autres fois, il allait, avec sa grand-mère qu’il chérissait,
faire le tour des maisons du village, à l’écoute des der-
nières nouvelles, des discussions, des rumeurs et des