ReMed 2016 ReMed Magazine N°1 - Nervous System | Page 45

ReMed Magazine Littéra’Tour LA FOLIE DANS LA LITTERATURE « Et qu'est-ce que la folie, après tout, sinon une sorte d'originalité mentale ? Je dis la folie, et non point la démence. La démence est la perte des facultés intellectuelles. La folie n'est qu'un usage bizarre et singulier de ces facultés. » – Anatole France A R S L A N A L L O U A C H E A h, la folie… ce curieux état d'esprit maintes fois dépeint dans la littérature et jouissant d'un fort intérêt porté par les écrivains de tout temps. Car comme un médecin qui s'intéresserait à la maladie pour garantir l'état de bonne santé, ces écrivains ont exploré l'aspect pathologique de la psyché pour déceler les modes par lesquels elle s'exprime. Voici donc une liste, loin d'être exhaustive, de ces aventuriers ayant exploré l'esprit humain pour en tirer un imperceptible coup d'œil sur l'inconscient commun de l'humanité. Commençons par Maupassant Etant lui-même atteint de maladie mentale, et ayant écrit son œuvre majeure lors de son internement dans un hôpital psychiatrique, ce français a fait de Le Horla un exutoire par lequel il exprimait ses angoisses et ses pulsions les faisant revivre à travers le journal intime. Perdu dans une forme d'hallucination, le personnage de Maupassant voit son énergie vitale aspirée par une créature invisible le laissant sujet à des pulsions de mort ; pulsions dont l'auteur lui-même faisait l'objet, et qu'il retranscrivait dans ses écrits par procédé Cathartique. Molière et son Argan C'est avec le malade imaginaire que Molière nous initie aux troubles somatoformes, l'hypochondrie pour être exact ou le délire durant lequel le sujet est persuadé d'être atteint d'une maladie grave. En effet, Argan, le héros principal de cette comédie, est un triste personnage qui feint d'être malade dans le but inconscient de se faire choyer par son entourage. Organisé en satire, cette comédie se moque ouvertement des médecins de son époque qui, s'aidant de saignées, de purges et de toutes sortes de remèdes, étaient plus soucieux de plaire à leur client qu'à l'aider réellement, se laissant ainsi entrainer dans leur délire de leur malade sans s’en rendre compte. Notre héros ira même jusqu’à simuler sa propre mort pour voir les réactions de ses proches et découvre avec effroi que sa femme souhaitait secrètement qu'il meurt et la délivre du fardeau qu'il incarnait. Ka�ka, passé maitre dans l'absurde In�luencé à la fois par le modernisme et le réalisme ou même l'anarchisme et précurseur de l'existentialisme par la constante absurdité de son univers et son cynisme. Montrant des signes d'hypochondrie, de dépression et de phobie sociale, Ka�ka, contrairement à Maupassant, ne verra pas en l'écriture un exutoire. Bien au contraire, il y voit un mal atroce qui « implique une ouverture totale du corps et de l'âme » mais un mal nécessaire qui lui permettra à travers des œuvres telles que La métamorphose ou Le verdict de laisser sa marque dans l'histoire de la littérature et d'in�luencer plusieurs auteurs célèbres tels que Milan kundera ou Gabriel Garcia Marquez au point où ka�kaı̈en est devenu synonyme d'irrationnel et de surréalisme. 44