REESOR
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Petit à petit, la communauté disparait. Les commerces ferment, la congrégation mennonite se dissout et les écoles se vident. Après avoir tout donné à cette terre, ils repartent encore une fois les mains vides.
Ce territoire qui semblait si prometteur au début rapporte peu de bénéfices. L’évolution des méthodes d’agriculture, l’arrivée des automobiles, des radios et les pensées plus individualistes laissent peu d’espoir à ceux qui restent. Les voyages à l’extérieur de la communauté permettent de constater que la prospérité est possible ailleurs. En effet, plusieurs membres de congrégations mennonites du Sud ontarien et du Manitoba possèdent des fermes rentables.
Pour la majorité, la décision est facile à prendre. Pour d’autres, la Deuxième Guerre mondiale provoque leur départ. Même si les mennonites rejettent la participation à des conflits armés, le gouvernement recrute les hommes d’âge majeur pour des services militaires civils. Les femmes et les enfants sont ainsi laissés à eux-mêmes durant cette période et ont peine à survivre.
À la fin de la guerre, seulement 12 familles mennonites demeurent toujours à Reesor. À la fin des années 1960, quarante personnes, dont un seul descendant des immigrants, vivent toujours à Reesor.
Malgré les départs successifs, les liens qui unissent les gens de Reesor demeurent. Pendant plusieurs années à partir de 1945, les anciens, et par la suite leurs descendants, se réunissent pour un pique-nique annuel et se remémorent le passé. Les rencontres ont lieu parfois dans le Sud ontarien, mais aussi à Reesor. L’herbe qui envahit les propriétés abandonnées n’efface pas les souvenirs. L’histoire de ces gens venus conquérir cette région sauvage se doit d’être partagée. Elle a d’ailleurs été présentée dans une production théâtrale lors du « Toronto Fringe Theatre Festival » en 2007.
L’histoire de Reesor n’est pas celle qui vient à l’esprit quand on entend son nom. Hélas, l’endroit est plutôt associé à une tragédie survenue en 1963 pendant un conflit de travail des bûcherons syndiqués à l’emploi de Spruce Falls de Kapuskasing.
L’incident qui a couté la vie à 3 personnes s’est déroulé où se trouvait auparavant la gare du millage 101. Toutefois, aucun résident de la communauté n’y a pris part.
Photo de :
Toronto Theatre Database