Portfolio - Louis Robert Master Thesis - Mémoire de Master | Page 80
-HALLAUER, Edith. « L’université foraine : la chose pu-
blique », dans Strabic, 13 novembre 2014,
http://strabic.fr/L-Universite-Foraine :
« Après avoir vécu trois années intenses de « permanence architecturale » à Boulogne-sur-Mer
pour réhabiliter des logements sociaux, on retrouve Sophie Ricard à Rennes, aux premières
lignes d’un projet en apparence complexe, mais profondément citoyen : l’Université Foraine.
Actualité brûlante : après deux premières années d’actions, les collectivités devaient statuer le
6 novembre dernier sur le devenir de cette expérimentation en acte de la chose publique : on
continue, ou on arrête ? Récit de l’intérieur.
Strabic : Comment es-tu arrivée là, et quel est l’enjeu de l’Université Foraine ?
Sophie Ricard : Patrick Bouchain m’a proposé cette permanence à la suite de l’opération
« Construire Ensemble le Grand Ensemble » à Boulogne-sur-Mer. Ce n’est évidemment pas
du tout le même milieu socio-économique, pas la même question, ni le même chantier. Mais
être passée par des problématiques extrêmement concrètes m’a armé je crois pour faire face
à tout type de contexte. Rennes est une ville économiquement stable, très administrative,
relativement confortable, où il n’y a pas encore de fossé économique alarmant entre les popu-
lations, ni de chômage alarmant. À Boulogne-sur-Mer, nous n’étions pas dans ce cadre-là, la
situation était profondément urgente.
À Rennes, l’idée est de se redonner du temps pour requestionner la commande publique.
Le maire, Daniel Delaveau, devait faire face à une problématique que l’on retrouve dans
beaucoup de nos villes : les bâtiments patrimoniaux délaissés par manque de moyens pour les
réhabiliter. La question que nous posons est : a-t-on encore besoin de lancer une commande
publique démesurée pour faire une institution « culturelle » aux normes draconiennes dans ce
genre de bâtiment ? Mais surtout, puisque nous n’avons pas les moyens de le faire, pourquoi
ne pas tenter de faire autre chose ?
Va-t-on en venir à démolir ces bâtiments historiques sous prétexte qu’ils coûtent trop cher à
rénover ?
Ou faut-il, à défaut, vendre tout le patrimoine national pour en faire des hôtels de luxe ? À
Rennes, le bâtiment Pasteur, ancienne faculté dentaire en plein centre-ville, allait être vendu
pour un euro symbolique à un groupe hôtelier. Patrick Bouchain a alors proposé au maire de
lui confier le bâtiment pour la même somme, afin de mener une expérience et de réfléchir ainsi
à cette problématique nationale. Comme à Boulogne-sur-Mer, nous sommes arrivés sans rien
avoir dessiné à l’avance. Nous avons proposé de réouvrir ces lieux, s’y installer et inviter les
citoyens à venir en parler. Ramener la vie dans ces bâtiments, d’abord par l’occupation de son
architecture.
Strabic : Pourquoi s’installer à Rennes ?
S. R. : Si Boulogne-sur-Mer était un travail de « réparation », Rennes serait celui de la
prévention. Le maire de cette ville a été le premier à vouloir tenter l’expérience de l’Univer-
sité Foraine : l’expérimentation en acte. Aujourd’hui, l’expérience a également lieu à Cler-
mont-Ferrand. Comme à Boulogne-sur-Mer, ces projets sont issus de relations de confiance
entre un élu et un architecte. Pour Patrick Bouchain, l’architecte doit avoir ce rôle de
conseiller aux villes et aux communes. Pour ma part je pense qu’il est absolument nécessaire
de retrouver cette confiance.
Les méthodes des concours et appels d’offres sont impérativement à redéfinir dans notre
démocratie.
On y est bien trop éloignés de ce qui fonde l’acte de construire. Pour des opérations expéri-
mentales comme celles-ci, la confiance est fondamentale. Ces énergies sont belles seulement
si elles sont portées, aidées. Autrement elles ressemblent à du militantisme pur et dur, qui use
et freine toute avancée.
Strabic : Comment avez-vous abordé le sujet cette fois-ci ? Également par la permanence ?
S. R. : Oui. L’idée est de partir de l’existant : le non-programmé, et de le travailler comme tel.
Il y a un bâtiment vide, dans une situation bloquée. Pourquoi ne pas l’ouvrir à plusieurs types
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