Oil&Gas Buisiness Issue Volume 20 | Page 49

intermede années sans que je m ’ en rende compte . et puis il y a la foi . Oui , la foi fait avancer le destin . elle l ’ adoucit . elle arrondit ses extrémités tranchantes . et ils se confondent , le destin et la foi , pour faire la vie . Je n ’ ai jamais cherché à comprendre . Mon père me maria à quatorze ans . et il ne m ’ a pas demandé mon avis . Il n ’ avait pas besoin de mon avis . Je n ’ ai pas , non plus , donné mon avis pour les quelques mètres de tissu qu ’ il m ’ avait acheté en guise de trousseau de mariée . Les hommes faisaient tout . Ils étaient nos maîtres . Je ne me souviens pas avoir contesté , un seul jour , un des ordres de mon père ou de mon mari – ton père . dire non à un père ou à un mari , c ’ est dire non à dieu . Au mektoub . A la vie …» un long soupir s ’ exhala de sa poitrine comme s ’ il revenait d ’ un long et exténuant voyage . Lentement , elle expira ; puis tout en gardant son sourire , elle continua : « A seize ans , j ’ étais mère . La vieillesse avait déjà commencé son travail de sape . A trente ou quarante , le destin enroulait son tapis . c ’ est comme ça . Les choses ne pouvaient pas être autrement . Il y avait l ’ homme , et puis bien après , bien après , venait la femme …» A cet instant , son sourire s ’ éclipsa . Son front se plissa de rides . Je compris que ce qu ’ elle allait dire lui revenait difficilement . Avec une voix presque inaudible , elle continua : « A dix ans , sans que personne ne nous le demandait , nous nous interdisions — à nousmêmes — de sortir . Les portes se fermaient derrière nous à jamais . Les fenêtres aussi . Les femmes devaient vivre à l ’ intérieur . dans les cours , entre les murs …» une larme s ’ obstina à rester suspendue dans le coin de son œil . Je lui souris avec mon sourire d ’ enfant . Son visage s ’ illumina de cet amour de ces années-là . Je voulus l ’ enlacer jusqu ’ au jour du jugement dernier pour dire à dieu : « Voici ma mère . faites-lui la meilleure place au paradis pour tout ce qu ’ elle a enduré . Pour tout ce qu ’ elle a donné … » Sa voix me fit revenir à moi . Sans avoir jamais été à l ’ école , ses paroles semblaient venir de quelques livres de savants et érudits . Je bus ses dernières paroles pour qu ’ elles restent présentes en moi comme le sang dans mes veines : « Je n ’ ai pas vu le temps passer . et pourtant chaque soir , j ’ attendais le jour d ’ après . cette attente me faisait vivre . Quand on attend , on oublie le présent . notre présent on le tuait dans l ’ attente . et les jours passaient . Passaient . Sans revenir . Ils emportaient nos douleurs . Ils cachaient nos malheurs .» « Va mon fils , ne t ’ en fais pas pour moi . donne de ton amour à la femme et tu seras homme , mon fils …»

Elle ne finit pas sa phrase . Elle n ’ en avait pas besoin . J ’ avais tout compris . J ’ avais compris pourquoi Allah avait mis le paradis aux pieds des mères .
elle ne finit pas sa phrase . elle n ’ en avait pas besoin . J ’ avais tout compris . J ’ avais compris pourquoi Allah avait mis le paradis aux pieds des mères . et que sans elles il n ’ y aurait pas d ’ humanité . et c ’ est pour ça que le mot qui les désigne est le même dans toutes les langues de la terre . et qu ’ il suffit de dire « M ’ a » pour que tous les enfants du monde comprennent qu ’ il s ’ agit de la mère . Oublier les mères est injuste et ingrat . Il faut vénérer les mères , les aimer et les respecter pour la vie qu ’ elles nous ont donné , pour le sein que nous avons tété , et pour l ’ amour dont elles nous ont abreuvé … �
OIL & GAS buSIneSS / nuMÉRO 20 / d É ceM b R e 2016 / 49