Oil&Gas Buisiness Issue Volume 20 | Page 48

intermede

« Donne de ton amour à la femme et tu seras homme , mon fils … »

Par rachid eZZiane , ecRIVAIn

Un soupir . un long soupir s ’ exhala de la poitrine de ma mère . Il venait de loin . de très loin . Je compris que le cœur de cette femme voulait me parler . Je m ’ assis . J ’ écoutai . « Vois-tu mon fils , à soixante-dix-huit ans , je n ’ attends plus rien de la vie . J ’ ai tout fini . Je suis prête à partir . J ’ ai déjà un pied de l ’ autre côté . Il suffit d ’ un souffle . J ’ attends ce souffle . Je sens qu ’ il est proche …» elle s ’ arrêta . Avec ses deux mains , elle fit revenir le bout du foulard vers l ’ avant de sa tête . elle en avait toujours deux . Le premier pour couvrir ses cheveux . Le deuxième pour le mettre en bandeau , pour enserrer sa tête . Je ne me souviens pas avoir vu ses cheveux à l ’ air libre . Même quand elle se peignait , elle se mettait à l ’ écart . tout était pudeur chez-elle . elle regarda dans mes yeux et comprit que j ’ attendais la suite . Son visage s ’ illumina par la clarté du jour . elle me sourit . Son sourire , presque enfantin , illumina la pièce et rendit son visage encore plus beau . « Mère , lui dis-je , as-tu été heureuse dans ta vie ? » elle me regarda d ’ un air étonné . Quelques rides plissèrent son front . un petit tremblement secoua sa main . chargé de silence , le passé se contractait , lui revenait , sûrement , par soupirs et chuchotements . Sous les verres de ses lunettes , ses yeux avaient une expression de joie et de mélancolie . Ils voulaient dire : « Pourquoi maintenant mon fils ? » J ’ eu envie de lui dire parce que les personnes âgées disent toujours la vérité . Je me retins . J ’ attendis … « Mon fils , ce mot – s ’ aïda – ( heureuse ) est trop fort pour moi . Les choses sont plus simples que ça . tout est destin . Mektoub . Pour ne pas sombrer dans le malheur , j ’ ai toujours accepté mon destin . Il m ’ a fait traverser des

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