Oil&Gas Buisiness Issue Volume 14 | Page 62

CHRONIQUE

Ligne rouge-feu rouge , ligne verte-feu vert

Par Redouane Malek

Chacun de nous a en mémoire cette fameuse ligne verte , devenue ligne bleue , pour finir ligne jaune et même blanche par endroits , peinte , puis dépeinte , puis encore repeinte sur le tracé de l ’ autoroute Zeralda-Aéroport d ’ Alger . Une ligne qui , de mémoire d ’ Algérien et d ’ Algérois n ’ a jamais été autant grillée par les usagers de la route , dussent-ils même en faisant cela , bloquer les véhicules de secours lors d ’ accidents de la circulation . « Nous avons tous besoin de secours » disait un usager , tancé pour avoir ralenti le passage d ’ un véhicule de police , il n ’ était pas le seul à l ’ avoir fait , mais il fut le « bachi-bouzouk » dans l ’ histoire ce jour-là . Pourquoi donc , les usagers ne respectent-ils pas cette ligne verte , puis bleue , puis jaune et par endroits blanche ? Pour une simple raison , vous diront-ils , par rébellion contre la création d ’ un couloir que certains voulaient comme un privilège réservé , puisque ce fut tout simplement le cas . C ’ est alors que pour les citoyens qui se disaient « je suis la ligne dans toutes ses couleurs », il était clair qu ’ il fallait pour eux bénéficier ensemble du privilège , ou alors être tous logés à la même enseigne . Ceci m ’ amène dans cette chronique arc-en-ciel à me poser une autre question , celle de savoir pourquoi donc les Algériens dans leur grande majorité respectent-ils le feu rouge ? A lire les statistiques des services de sécurité en termes de verbalisation des usagers de la route , griller le feu rouge est le parent pauvre des PV . Un usager questionné sur le sujet , a eu cette réponse , qui a le mérite d ’ être reproduite ici : « C ’ est une signalisation qui n ’ ouvre droit à aucun privilège , égalité assurée . ». Tiens donc et si l ’ histoire de griller une ligne symbole de privilège , et de respecter un feu rouge symbole d ’ équité , devenait de la sorte et sans le dire , notre « Nuit debout » à nous , notre « Podémos », notre « Syriza ». Les lignes quelques soient leurs couleurs , paraissent dans notre pays faites pour être franchies , car elles symbolisent un privilège . Les Algériens par nature sont rétifs aux privilèges quand ils vivent l ’ équité , vite rebelles quand ils sentent s ’ installer les passe-droits , mais plus grave encore , complices du pire lorsque n ’ existent plus de lignes pour les contenir et les freiner . Mais n ’ est-ce pas que l ’ essence même des lignes est d ’ être appelées à bouger , car elles sont par nature mouvantes et amovibles ? Les feux , les feux de Bengale , les feux tricolores , et autres feux ne seront toujours que des couleurs , si à la base elles ne sont pas bien définies , expertement tracées mais surtout respectées , et que le premier des respects se doit de l ’ être sur le sol national , pas dans un autre pays , où la rigueur de la loi vaut pour tout le monde . Il me vient à l ’ esprit que l ’ histoire des lignes et des feux , ressemble à s ’ y méprendre à la fable de La Fontaine sur le voyage du pot de fer et du pot de terre . La morale de la fable étant de ne nous associer qu ’ avec nos égaux ou bien qu ’ il nous faudra craindre le destin de l ’ un des deux héros de la fable , dont le premier finit jeté sur la route cahoteuse , et le second en mille morceaux à force de se heurter à son compagnon . •

62 / OIL & GAS business / NUMÉRO 14 / Avril 2016