My first Publication n°69 | Page 5

Rue des Beaux-Arts n°69 – Octobre/Novembre/Décembre 2019 courtisanes » de Balzac. Mais on s’accorde plutôt à identifier Charlus avec l’esthète Robert de Montesquiou, poète et dandy insolent, qui inspira également Huysmans pour son personnage de Des Esseintes dans son roman « A Rebours ». Cependant, certains se sont risqués à invoquer aussi Oscar Wilde. Comment Marcel Proust en serait-il venu à s’inspirer d’Oscar Wilde  ? Ils s’étaient rencontrés à trois reprises en 1891 et 1894, la première fois dans un salon parisien 1 où le jeune Marcel faisait ses premières armes de mondain, une seconde fois chez les parents de Proust où les choses s’étaient mal passées 2 . Et ce sont en effet les mots blessants de Wilde que l’auteur de « La Recherche » mettra dans la bouche du baron de Charlus dans «  La Prisonnière  » quand il s’exclamera à l’instar de Wilde devant le mobilier peu élégant du salon du Boulevard Malesherbes  : «  Comme c’est laid chez vous  !  ». C’est que Charlus est un esthète, un apôtre du goût, comme l’était Wilde. Lui aussi veut faire de sa vie une œuvre d’art. Ainsi que le souligne le professeur et biographe Philippe Berthier 3 , il met sans cesse sa vie en scène, comme le fit inlassablement Oscar Wilde (et Montesquiou peut-être davantage encore). Arbitre des élégances, il conseille les femmes sur leur toilette, et il est notoire que Wilde, éphèmère directeur du journal féminin, «  The Woman’s World  », 1 Chez Mme Baignères où Jacques-Emile Blanche les présenta l’un à l’autre. 2 Le troisième rencontre aurait eu lieu au cours d’un dîner en avril 1894. 3 Philippe Berhier – « Charlus » - Editions de Fallois - 2017 5