Rue des Beaux-Arts n°69 – Octobre/Novembre/Décembre 2019
une grande expressivité. Comme dans la réitération obstinée de la
demande de Salomé (1893).
Quand les performances musicales font référence au sensuel ou à
l’érotisme, la musique devient une métaphore de l’amour érotique.
Dans Charmides (1881, rév. 1882), Wilde compare l’expérience d’une
émotion musicale à une expérience érotique. L’usage de la sensibilité
musicale témoigne la distinction entre ceux “who have learned who
Eros is” (CW 800) et ceux qui ne l’ont pas appris.
The Critic as Artist (1890, rév. 1891) se révèle également métaphorique.
La musique est une métaphore pour le langage du poète: “No poet
sings because he must sing. (…) A great poet sings because he chooses
to sing” (CW 1118). En termes musicaux Wilde décrit la prose
puissante et majestueuse de Ruskin (CW 1126) et le langage des
poètes Browning (CW 1111) et Shakespeare (CW 1119). Il compare la
dictée de l’aveugle Milton (CW 1115) à la composition et préconise ainsi
le retour à la voix. Il associe langue avec musique lorsque les mots ont
une musique aussi douce que celle du luth ou du violon (CW 1117).
Puis il continue en affirmant que la musique de la prose mystique de
l’essai de Walter Pater sur Monna Lisa est aussi douce que celle du
joueur de flûte qui prêta aux lèvres de la Joconde ces courbes subtiles
et empoisonnées (CW 1126). L’acteur est l’instrument réalisant une
œuvre littéraire. Sibyl dans The Picture of Dorian Gray est une flûte
enchantée qui rend la musique de Shakespeare plus mélodieuse et
plus rayonnante (CW 82), tandis que Willie Hughes est dans The
Portrait of Mr. W.H. (1889) un “delicate instrument” (CW 323, 327) pour
le barde britannique.
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