Montréal pour Enfants vol. 24 n°2 / Printemps 2024 | Page 15

UN TOURBILLON DE RAISONS

Dès le départ , les chercheurs le confirment : la nature a un rôle dans le fait qu ’ un enfant soit plus enclin qu ’ un autre à réagir à tout ce qui l ’ entoure . Mais il ne s ’ agit là que d ’ un germe dans le climat émotionnel familial .
Le tempérament , entre autres choses …
Guadalupe Puentes-Neuman , responsable du programme de psychologie clinique de l ’ enfant , de l ’ adolescent et des parents , à l ’ Université de Sherbrooke , décrit ainsi les premiers signes de l ’ impulsivité : « Alors vous avez des parents qui mettent des pancartes à l ’ entrée de la maison : ne frappez pas , parce que bébé dort ! Et il y a d ’ autres parents qui peuvent passer l ’ aspirateur et écouter de la musique , recevoir des amis et ça ne dérange pas le bébé . »
Bonne nouvelle pour les parents qui entendent ainsi pleurer lorsqu ’ on tape à la porte : il ne s ’ agit pas là d ’ une sonnette d ’ alarme avertissant qu ’ un enfant colérique ou boudeur se prépare . Sophie Parent , professeure à l ’ École de psychoéducation de l ’ Université de Montréal , spécialisée en relation mèreenfant , développement des compétences et santé mentale , assure que ces enfants , par nature plus réactifs , ont bien d ’ autres cordes à leur arc autres que les larmes : « Ils bougent avec vigueur . Ils expriment leurs émotions avec beaucoup de force , autant la joie que les émotions négatives . C ’ est un trait de tempérament . Ce n ’ est donc pas quelque chose qui est négatif ou positif au départ . »
L ’ environnement accueille avec plus ou moins d ’ enthousiasme , selon le cas , le tempérament explosif de l ’ enfant et sa tendance à repousser les limites . Et ces enfants au caractère vif réagiront aussi plus intensément que les autres à l ’ accueil qui leur est réservé . La manière dont les proches et leurs éducateurs accompagneront ces jeunes , ainsi que la gestion de leurs émotions par lesquelles ils sont dépassés parfois , déterminera la suite des choses .
Les jeunes tempéraments impulsifs ne sont pas les seuls à fournir beaucoup d ’ efforts pour ne pas se désorganiser durant les premières années de leur vie , et même par la suite , lorsque l ’ émotion monte un peu trop . Dès les premiers mois , le bébé apprend à se détourner des stimulations trop intenses . Jusqu ’ à cinq ou six ans , toute la partie préfrontale du cerveau , qui sert à gérer les émotions , se développe à pas de géant .
Guadalupe Puentes-Neuman se souvient , à ce sujet , d ’ une expérimentation où des enfants se faisaient demander d ’ attendre avant de manger une guimauve . Certains avaient opté pour des stratégies qui puisaient directement dans les ressources de leur imagination . Ils parvenaient alors beaucoup mieux à se contrôler que ceux qui ne faisaient pas appel à cette faculté d ’ abstraction : « L ’ exemple qui m ’ avait vraiment frappée à ce moment-là , c ’ était l ’ enfant qui avait regardé les guimauves et qui s ’ était dit ‟ Cela a l ’ air de nuages !” Donc , il a transformé les guimauves en nuages dans sa tête et cela lui a permis d ’ attendre plus facilement . »