Olivier Didier , chercheur au département de psychologie , à l ’ Université de Sherbrooke , précise que ce décodage ne suffit pas à rendre une personne disposée à se soucier de l ’ autre : « Il faut partiellement la ressentir soi-même ! » Cette partie , habituellement nommée plus « affective », réfère aux expériences et aux souvenirs interpellés , dans notre imagination , par une situation nouvelle , qui nous aide à faire le lien entre nos sentiments et ceux des autres .
Un développement en attente d ’ ébullition
Selon la situation , toutefois , nous devons doser ces deux éléments essentiels que sont l ’ émotion et l ’ analyse plus cognitive . Aucune recette ne s ’ applique en ce domaine . Tout être humain le fait de façon partiellement instinctive . Déjà , nos ancêtres primates avaient tout intérêt à décoder les attitudes de leurs pairs pour assurer leurs arrières . On observe aussi que les bébés , dès leurs premiers jours , se mettent souvent à pleurer lorsqu ’ un autre fait de même à leurs côtés .
Cependant , il ne s ’ agit là que de bribes d ’ empathie , d ’ abord parce qu ’ en bas âge , l ’ enfant distingue encore mal ce qui relève de lui et ce qui relève du monde extérieur , et en particulier du premier responsable de ses soins . Plus jeune , l ’ enfant analyse les situations en fonction de ses propres besoins . Puis , la maturation de son cerveau , sa capacité d ’ abstraction et l ’ observation de plus d ’ une réaction possible à une situation l ’ ouvrent à de nouvelles possibilités . Émilie Girard , psychologue clinicienne , ajoute que l ’ acquisition du langage offre accès à une multitude de solutions de rechange à une situation qui ne convient pas ou pour cerner ce qui se passe , en soi ou autour de soi : « C ’ est sûr qu ’ à trois ans , l ’ enfant n ’ a pas le vocabulaire pour dire ‟ Je n ’ ai pas aimé ce que tu as fait , alors je vais m ’ en aller .” Donc , il fait la première chose qui lui passe par la tête : il frappe l ’ autre ou lui enlève son jouet . C ’ est vraiment de l ’ impulsivité , parce qu ’ il y a aussi les zones frontales qui ne sont pas encore suffisamment développées . »
Il faudra ensuite à l ’ enfant quelques années pour comprendre que le monde ne tourne pas autour de lui . Avec le temps , il apprendra néanmoins à réagir plus adéquatement aux autres et à se préoccuper de leur sort , par-delà ses sens , explique Vincent Bégin , professeur au Département de psychoéducation , à l ’ Université de Sherbrooke : « L ’ enfant peut être sensible et empathique face à un ami ou un camarade de classe parce qu ’ il sait que ses parents n ’ ont pas beaucoup de moyens ou que cet enfant est victime d ’ intimidation . Ça ne se passe pas devant ses yeux , mais il est capable d ’ extrapoler une situation , pour avoir une réponse empathique . »
L ’ empathie de type « non contagieuse »
Avec le temps , l ’ enfant apprendra à réagir plus adéquatement aux autres , et à se préoccuper de leur sort , par-delà ses sens . Par exemple , il prendra conscience qu ’ un ami vit une situation difficile , à la maison ou dans une autre classe .
Toutefois , la distinction entre les émotions des autres et les siennes ne se fait jamais totalement . Émilie Girard croit que quelques questions bien ciblées du parent peuvent aider à les distinguer , notamment en clarifiant les liens entre les causes et
16 psychologie www . montrealpourenfants . com