Montréal pour Enfants vol. 23 n°2 / Printemps 2023 | Page 22

Isabelle Nizet déplore cet obstacle qui empêche d ’ atteindre une réelle collaboration . Elle souligne pourtant que ses effets bénéfiques pour les jeunes plus faibles , sur l ’ apprentissage , même des plus forts , sur le plan de la valorisation , sont bel et bien démontrés , dans les cas où les autres sont préparés à les inclure . Elle admet toutefois qu ’ il demeure assez irréaliste de parvenir à de tels effets bénéfiques lorsque les partenaires en présence se situent à des niveaux trop différents : « Ce n ’ est pas parce qu ’ un élève en difficulté est avec un élève fort qu ’ il va faire un progrès immense tout d ’ un coup . Un élève en difficulté peut faire des petits pas , c ’ est ce que l ’ on appelle sa zone de développement proximale . Quelqu ’ un qui saute 1 mètre ne peut pas sauter 2 mètres d ’ un seul coup : il va sauter un 1,5 mètre et il évoluera par petits pas . »
Les parents , des partenaires d ’ équipe désirables ?
La capacité ou la volonté des parents à encadrer ou à soutenir les jeunes dans leurs travaux d ’ équipe contribuent aussi à cette inégalité , quoique les jeunes ne le voient pas nécessairement de cette manière . Victor , par exemple , rapporte fièrement une situation où il a fait appel à l ’ expertise professionnelle de son père : « Mon père est graphiste . Un jour , on devait faire une caricature pour l ’ école en équipe . Alors j ’ ai pris son ordinateur et je suis allé sur ses logiciels . Ce sont des logiciels assez complexes , alors , j ’ ai eu de l ’ aide sur ce point-là . »
Isabelle Nizet affiche une attitude méfiante devant ce genre d ’ intrusion parentale qui fait que les travaux , individuels ou de groupes , ne reflètent plus seulement les acquis de l ’ élève en classe : « Pour moi , un parent devrait se désengager du travail d ’ équipe . Il ne devrait pas intervenir là-dedans . Parce qu ’ il vient fausser les données dans l ’ équipe . Il ajoute un autre joueur qui est un peu en coulisses . »
Cet avis diffère cependant de celui de Mélanie Dumouchel , qui y voit une belle occasion de communiquer un savoir à tout un groupe , et peut-être à la classe , si le parent ou l ’ enfant acceptent de partager leur expérience . Mais cette maman chercheuse croit que l ’ appui attendu du parent se situe surtout à un autre niveau . Elle suggère aux parents de plutôt s ’ impliquer en facilitant les rencontres entre les membres de l ’ équipe , lorsqu ’ elles doivent se dérouler le soir , et , encore plus , d ’ aider les enfants dans l ’ apprentissage des gestions de conflits , si fréquents dans ce genre de situation : « Ça en prend beaucoup aux enfants pour affronter un groupe d ’ amis , le lendemain , en classe . Il faut donc les outiller et leur donner confiance en eux . On peut leur demander , le soir , comment ça s ’ est passé . Il faut leur montrer que c ’ est important d ’ être bien dans une équipe et qu ’ ils n ’ ont pas à tout accepter ou à faire tout le travail . »
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