Montréal pour Enfants vol. 20 n°4 / La rentrée scolaire 2020 | Page 28
Se pardonner,
est-ce possible ?
LA CULPABILITÉ PARENTALE EST
DIRECTEMENT RELIÉE À LA CAPACITÉ
DE RESSENTIR DE L’EMPATHIE POUR
SES ENFANTS, CE QUI N’EST PAS UNE
MAUVAISE CHOSE. POURTANT TROP
DE REMORDS ET DE QUESTIONS
PEUVENT EN VENIR À PARALYSER
L’ACTION. EST-IL POSSIBLE ALORS
D’ASPIRER AUX AVANTAGES DE L’UN
SANS CÉDER À UN BROUILLAGE PER-
PÉTUEL DE SES REPÈRES ? TOUT EST
UNE QUESTION D’ÉQUILIBRE. POUR
PARVENIR À CET ÉQUILIBRE, IL FAUT
TOUTEFOIS ENCORE SE POSER DES
QUESTIONS…
LORSQUE LA CULPABILITÉ
ENVAHIT LE TERRITOIRE
Tout en insistant sur ce lien entre la culpabilité
et la saine empathie, Chantal Martel
cite de nombreuses études démontrant
l’effet néfaste de la culpabilité sur l’épuisement
parental : « Ce n’est donc pas tant
l’émotion que la pensée que cela évoque.
C’est la pression qui vient avec et le fait
d’avoir des pensées qui ne sont pas nécessairement
productives ou de ne pas
avoir de stratégies d’adaptation qui seraient
facilitantes », précise-t-elle.
Et Mélanie Bilodeau poursuit sur cette lancée
en disant que l’insatisfaction dans le
travail et le reste de sa vie peut aussi avoir
un effet boomerang sur la vie de famille :
« Le stress que l’on va vivre au travail, le
stress financier : tout cela fait partie de la
culpabilité que l’on va vivre au quotidien,
parce que cela peut nous amener à devenir
plus instable, plus impatient avec nos
enfants. Alors nous ne répondons pas à
nos attentes de pratiques parentales. »
Ainsi débordés par un si grand nombre de
préoccupations, les parents ne se donnent
plus souvent le droit de dire « Non, je n’ai
pas envie », quitte à gérer le petit moment
de frustration enfantine qui s’en suivra.
Pourtant, André Perron demeure convaincu
qu’en s’oubliant dans l’équation, on ne
reflète pas à son enfant une image très
positive du rôle de parent, ce qui risque
même de transmettre, à son tour, le gène
de la culpabilité : « Ce n’est pas un modèle
de croissance et d’autonomie, ou encore,
de plaisir de vivre. C’est un modèle d’exigence,
qui rappelle “J’ai tout fait pour toi!”.
J’ai vu ça. “Regarde ce que tu me fais
faire!”, ce qui signifie un peu “Tu es responsable
de ma mauvaise humeur ou de
ma mauvaise santé.” »
BYE-BYE MON IDÉAL,
BIENVENUE LA RÉALITÉ !
Pour le bien de l’enfant, Chantal Martel
invite les parents à remettre en question
l’accessibilité de leurs idéaux, et ce, même
lorsqu’elle aborde des thèmes aussi intouchables
que l’allaitement : « On sait que
l’allaitement c’est bon. Mais je sais aussi
que, ultimement, ce que je veux, c’est le
bien de mon enfant. Et dans ce processus,
l’autocompassion est également importante,
pour se dire : “J’ai essayé, ça n’a
pas fonctionné. Il y a peut-être une adaptation
à faire face à l’idéal que j’avais.” Mais
encore une fois, c’est un processus interne
de réflexion en lien avec l’émotion ressentie.
»
Une autre attitude que tend à valoriser
Annie Paquet est de rechercher les bons
moments, ceux qui, sans frôler la perfection,
ont permis de sentir le bonheur d’être
parent, ceux qui marqueront encore leur
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